Aucun doute, les hommes suscitent aujourd'hui l'intérêt des marques ! Ils ont longtemps été la chasse gardée des grandes marques du sport, de l'automobile, ou de la banque. Ils intéressent, aujourd'hui, l'univers des cosmétiques et du soin, qui y voit un formidable relais de croissance par rapport aux femmes, comme la mode ou la distribution (en témoigne l'ouverture récente du BHV Homme) qui en font leur cible privilégiée...
Il ne s'agit pourtant pas d'une cible facile. Les hommes ont traversé de nombreux changements identitaires depuis les années 1990, qui avaient marqué la fin du modèle masculin traditionnel. Avant, ce n'était pas si compliqué d'être un homme... il suffisait de reproduire un modèle aux contours bien définis, qui dictait les comportements masculins.
Performance, autorité, négation du corps et des émotions, volonté de conquête, maîtrise de soi... un ensemble de valeurs enfermait les hommes dans des schémas prédéfinis, qui les rendaient facilement décryptables pour le marketing.
L'éclatement du modèle a laissé la place à la diversité. D'une part, des hommes fragilisés, en quête de repères. D'autre part, de nouveaux comportements émergents. Aujourd'hui, les hommes sortent de leur crise identitaire et se reconstruisent autour de nouvelles valeurs. Ils ont envie de découvrir, de faire de nouvelles expériences. Ils réinventent le rapport au corps. Les micro-tendances se multiplient, comme celle des "gay vagues", identifiée cet hiver par le New York Times aux Etats-Unis, qui souligne l'influence de la culture gay et le rattrapage rapide par les hétérosexuels des tendances créées par les gays, engendrant une difficulté accrue à différencier les deux communautés. Un phénomène dont la marque Abercrombie and Fitch a fait son fonds de commerce aux Etats-Unis.
La volatilité des nouveaux comportements pose un certain nombre de problèmes aux marques. Elles pariaient sur le métrosexuel féminisé, on leur explique aujourd'hui que celui-ci n'a plus cours. Il est remplacé par un übersexuel aux comportements nettement plus traditionnels. Qu'on les appelle "Himbos", "Zappeurs Caméléons" ou "übersexuels", chacun tente d'enfermer la réalité masculine dans des concepts, malheureusement trop souvent réducteurs. Ceux-ci masquent la réalité d'une cible disparate. Il faut revenir à l'homme vrai, sortir des schémas marketing enfermants et des typologies usées.
C'est dans cet esprit que Brain Value a développé pour le magazine VSD une étude fondée sur les scénarios de vie dominants des hommes d'aujourd'hui. Chaque scénario de vie reflète une sensibilité particulière, des choix de vie, des valeurs, des aspirations et des attentes qu'on retrouve dans différentes tranches d'âges ou CSP. Les différents scénarios cernent les motivations des hommes, qui varient selon leurs sensibilités, dans différents domaines de leur vie : le rapport aux femmes, au travail, à la réussite, les arbitrages entre vie professionnelle et loisirs, l'envie de découvrir, le goût de l'aventure, l'importance de la famille, ou encore la redécouverte du corps, désormais vécu comme une vitrine identitaire. Il apparaît que les différentes façons de concevoir sa vie au masculin ne sauraient être réduites à un seul concept marketing. Mais qu'on peut aussi fédérer les hommes par de nouvelles valeurs auxquelles ils étaient étrangers jusqu'à présent.
Une méthodologie donne aux marques les clés des nouvelles représentations des hommes, qui, loin des schémas caricaturaux en vigueur, sont susceptibles de générer de la projection et de l'identification, comme le cow-boy Marlboro avait su le faire en son temps. Cette approche offre aussi aux marques nombre de réponses à leurs questions : comment créer un lien entre une marque et sa cible ? Comment une marque peut-elle développer un point de vue sur les hommes, face à cette multiplicité des comportements ? Quelles valeurs mettre en avant pour séduire les hommes d'aujourd'hui, partagés entre valeurs traditionnelles, qu'il ne faut surtout pas oublier, et ouverture sur de nouveaux champs ? Peut-on parier sur un bénéfice émotionnel alors que les hommes sont traditionnellement attachés à des arguments rationnels (performance, technologie...) ? Comment véhiculer efficacité et performance sur des marchés à action lente (anti-âge...) ?
Un ambassadeur peut-il générer de la projection et rassembler les hommes ou va-t-il susciter un sentiment de rivalité et de compétition ? Cette question a beaucoup occupé les équipes marketing du groupe L'Oréal qui, après quelques expériences malheureuses avec des ambassadeurs trop enfermés dans les stéréotypes du modèle traditionnel (Michael Schumacher pour la publicité Elsève en 1999), a choisi d'abandonner les égéries (lancement de Men Expert en 2004, publicité Biotherm des années 2000-2005) et revient aujourd'hui aux ambassadeurs : Clive Owen pour Lancôme, Michalak pour Biotherm, George Eads, le héros de la série Les Experts, pour Elsève Intensif... et l'annonce récente du recrutement de Matthew Fox par Men Expert, dont Youcef Nabi, DG de L'Oréal Paris International, déclarait qu'il incarne des valeurs nouvelles dans l'univers masculin, "le naturel et la simplicité". Le marketing au masculin est en pleine réinvention. Les vieilles recettes ne fonctionnent plus sur une cible en pleine redéfinition. Entre un modèle traditionnel dépassé, mais dont nombre de valeurs restent d'actualité, et un nouvel homme en pleine redéfinition, dont les contours restent à explorer, la voie est étroite. Aux marques de relever le défi !
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