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Revue des marques : numéro 84 - octobre 2013
 

Quand l'éphémère devient durable

Donner une seconde vie à des matières destinées à être jetées, pour en faire des produits uniques, cette ambition fait de bilum une marque engagée.

Jean Lambert


l'éphémère devient durable
©Thomas Rusch
Les créations sont souvent le fruit d'une frustration.
C'est parce qu'elle n'a pas les sacs qui lui conviendraient aussi bien pour sa vie professionnelle que quotidienne qu'un beau dimanche matin, Hélène de La Moureyre récupère une bâche publicitaire en dépose sur le trottoir d'un grand magasin parisien. Nous sommes en 2004, et de son imagination vont sortir des dessins de sacs, dès 2005. Il est vrai que les antécédents familiaux – elle est née dans une famille de cinq enfants – peuvent parfois conduire à ne rien jeter, à tout récupérer pour tout recycler. Et recréer ! " C'est dans les pays en voie de développement, où l'on ne jette rien qu'est née l'idée du recyclage et je m'en suis inspirée ", précise Hélène de La Moureyre.
" Rien ne se perd, rien ne se crée, tout se transforme ", avait prévenu Lavoisier. La preuve ? Ses créations se déclinent au pluriel et ont pour nom bizace – son premier sac, une besace, toujours produit phare aujourd'hui –, cabalum – cabas de course –, bindian – sac à main –, balanse – sac au format A 4 –, ou bilordi – sacoche d'ordinateur... Autant de sacs, sacoches, trousses, housses, accessoires, fabriqués sous le triple sceau de l'unicité, de l'éthique et de l'écologique par la société bilum, avec un petit " b ". Mot pidgin de Papouasie-Nouvelle-Guinée, bilum signifie " filet de portage quotidien ". C'est en visitant l'exposition " Le Cas du sac ", retraçant, au musée des Arts décoratifs, l'histoire du sac dans le monde, qu'Hélène de La Moureyre vit pour la première fois un sac papou en écorce d'hibiscus avec comme indication : " bilum Papou, sac papou, Nouvelle-Guinée ". La marque, lancée le 16 mars 2006, est la première marque française à récupérer les bâches publicitaires géantes qui couvrent aussi bien les immeubles en travaux ou les grands magasins que les boulevards périphériques des grandes villes. Ironie du sort, Hélène de La Moureyre commercialisait ces mêmes bâches publicitaires quand elle travaillait comme directrice de clientèle chez Carat Event dans l'événementiel.
Le partenariat de " développement désirable " engagé avec Clear Channel, en 2011, participe de la volonté de proposer aux annonceurs une seconde vie pour leurs bâches publicitaires. Les marques peuvent ainsi mieux justifier leur exposition médiatique en la transformant en position écologique.
 

Éthique, unique et écologique

Sac Bilum
Sac Bilum Orange
Les bâches récupérées sont triées, sélectionnées et découpées à la main. Ces pièces sont ensuite nettoyées à l'éponge recto-verso avec des lessives écologiques dans l'atelier laboratoire de bilum, à Choisy-le-Roi, par du personnel venant d'entreprises d'insertion sociale.
Elles sont ensuite confectionnées par le personnel d'établissements et services d'aide par le travail (ESAT) et d'entreprises adaptées (EA) – qui accueillent des personnes handicapées – ou par des petits ateliers privés qui redécoupent toute les bâches à l'emporte-pièce, chaque pièce étant unique.
Les ceintures, récupérées dans les casses automobiles, puis triées, sont nettoyées une par une dans un centre d'aide par le travail qui emploie des personnes handicapées. Dernière étape, six ateliers de confection spécialisés dans bagagerie et le travail du cuir, situés France, assemblent les sacs. " Ces ateliers avaient perdu leurs clients, partis en Chine ", souligne Hélène La Moureyre, satisfaite, à juste titre, de pérenniser un savoir-faire artisanal. Les petits accessoires utilisés pour les sacs bilum sont d'origine européenne, France, Espagne et Italie. Bilum travaille ainsi avec la société YKK et avec la maison Éclair, toutes deux réputées pour leurs fermetures à glissière.
La grande variété de motifs ornant les bâches publicitaires ou événementielles permet de proposer des modèles uniques, des " collectors " ! " Les marques récupèrent les pièces que nous réalisons pour leurs dotations VIP, presse, ou même revente comme Agnès b. ou La Grande Epicerie de Paris par exemple ", précise Hélène de La Moureyre.
Pour faire un minibil – sacoche d'ordinateur 14' – par exemple, huit morceaux de bâches différents sont nécessaires.
Chaque morceau est découpé à la main pour constituer le puzzle du futur sac. Éthique par son engagement en faveur des entreprises locales, du " made in France " et par l'emploi de personnes handicapées, unique par la nature de ses produits, bilum, membre du collectif du développement durable, est écologique dans sa démarche : les sacs bilum parcourent moins de 70 kilomètres en moyenne, pour être produits puis distribués.
 

Produits héritage

Au bon marche
" Nous transformons les déchets des entreprises en produits héritage. On travaille l'histoire et l'héritage des marques à travers les matériaux qu'elles jettent. Ces matériaux sont à leur couleur, c'est une partie de leur histoire, de leur patrimoine, qu'il faut conserver et faire vivre autrement. Les marques doivent avoir de plus en plus le réflexe de nous les confier ", explique Hélène de La Moureyre. Des partenariats sont noués avec des marques et institutions prestigieuses comme Agnès b., le Club Med, l'Hôtel de Crillon, le musée du Louvre, Guerlain... pour lesquels bilum réalise – avec leurs bâches publicitaires, soit de protection (série " Hôtel de Crillon "), soit d'exposition (série " Monet "), soit publicitaire (la petite robe noire de Guerlain) – des sacs en série limitée sous le label " by bilum ". L'upcycling peut prendre la forme de carnets de notes et de sacs en papier comme ceux proposés avec Lesieur en 2012 et issus de la campagne d'affichage " Vive l'huile de tournesol 100 % origine France ". Après les bâches, bilum a étendu son champ de récupération aux ceintures de sécurité de voitures, transformées en anses et poignés pour les sacs, aux toiles de drapeaux, kakémonos, toiles enduites, rideaux et tissus muraux – dont ceux du Prince de Galles –, voiles de bateaux – dont celles du Club Med II –, aux airbags et récemment aux gilets de sauvetage d'Air France. Chaque matériau donne naissance à une collection : collection " bâche ", collection " airbag "...
" Le champ est ouvert, car toute matière qui a des propriétés de résistance, de solidité, d'imperméabilité, ou des qualités esthétiques, est destinée à revivre ", confie Hélène de La Moureyre. Les marques sont enfin immortalisées !
 
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