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Revue des marques : numéro 77 - janvier 2012
 

Lu donne le la

Harmony est le maître-mot de LU. Harmony pour réduire l'impact environnemental et défendre la biodiversité, harmonie des gens au coeur du discours publicitaire, harmonie identitaire des produits dans la famille LU.

Jean Watin-Augouard


"Point de margarine, point de graisse végétale, point de colle, point de glucose, point même de parfums chimiques, vanilline ou autres. Il n'en entre pas à la manufacture de Nantes. Mais du beurre de première qualité, mais des oeufs frais, mais des farines de premières marques, sans aucun mélange, aucune adultération. Comme résultat, des produits de choix, parfaits de saveurs" (1). En somme, la quête de... l'harmonie ! Gustative, bien sûr. N'était le style littéraire, ce texte pourrait figurer aujourd'hui dans le rapport de développement durable de toute société agro-alimentaire de... renommée. Elle fut la règle d'or édictée par Louis Lefèvre-Utile, le génial inventeur, entre autre, du Petit Beurre LU (1888) et de La Paille d'Or (1905), qui justifiait pleinement son slogan "à la renommée" (2). C'est au nom de cette même ambition, la renommée, mais cette fois-ci recherchée sur le plan environnemental, que LU décide, en 2007, de créer une filière de blé LU durable. "Le blé représente les deux-tiers des ingrédients que nous utilisons. Aussi, nous souhaitions concilier trois enjeux : fabriquer un blé qui réduirait notre impact environnemental sans réduire l'accessibilité de nos produits en termes de prix et favoriser le rapprochement avec les agriculteurs en achetant le blé à côté de nos neuf usines. Le bio (3) ne nous permettait pas de sourcer notre blé en France et donc de vendre sans augmenter le prix", explique Anne Génin, directrice marketing LU et développement durable.
La quête de l'harmonie - du grec harmonia qui signifie "assemblage" ! La France n'est-elle pas, par excellence, le pays de la culture du blé (4) ?

Centre européen de recherche à Saclay
Centre européen de recherche à Saclay

Nouvelle filière

LU'Harmony est lancé lors des semis de 2008 et, puisque le cycle du blé s'étend sur neuf mois, le blé semé en octobre 2008, est récolté en juillet 2009, passe chez le meunier en août pour devenir farine qui est ensuite sélectionnée dans l'usine LU, à proximité du champ (5). Le biscuit LU sort en novembre 2009 pour être commercialisé tout au long de l'année 2010. A tout seigneur, tout honneur : il revient au Petit Beurre Lu (4 % des ventes sous marque LU) d'inaugurer cette nouvelle filière. "La première année, nous avons travaillé avec 68 agriculteurs de la région nantaise, un meunier et une coopérative agricole. La superficie représentait 1 140 hectares et le volume, 8 000 tonnes", rappelle Anne Génin. Dans le droit fil de la règle d'or de Louis Lefèvre-Utile, le cahier des charges de LU'Harmony, élaboré avec des ingénieurs agronomes, des ONG et l'INRA, impose 28 pratiques agricoles (choix des parcelles, des variétés de blé, irrigation, traitement des cultures...) plus respectueuses de l'environnement et au service de la qualité des biscuits. Inauguré à Saclay, le 20 octobre dernier par Irène Rosenfeld, pdg de Kraft Foods Inc., le centre européen R&D participe de cette démarche puisque, au nombre de ses trois axes de recherche principaux dont la nutrition santé et l'innovation/ plaisir, figure le développement durable. Le centre contribue à la sélection de nouvelles variétés de blé, plus résistantes aux maladies. "L'objectif est de privilégier l'action préventive et non curative", ajoute Anne Génin. Au nombre des mesures originales, celle qui bannie la culture intensive qui, sur des milliers d'hectares, fait disparaître la biodiversité et l'écosystème. Chaque agriculteur doit consacrer 3 % de l'espace de son champ de blé à des fleurs qui font venir les abeilles, les papillons, agents essentiels de la pollinisation. LU leur donne une prime pour compenser la perte d'exploitation.

Petits Lu

Bilan du cru 2009 ? "Très satisfaisant", et ce, sur trois plans. Les agriculteurs, tout d'abord, qui, accueillis par LU pour visiter l'usine, sont "très contents de voir comment leur travail est transformé, valorisé sous la forme de biscuit. L'image d'agriculteurs "pollueurs" s'efface", souligne Anne Génin. Deuxième motif de satisfaction : les deux indicateurs fixés pour suivre la pertinence de la filière sont dans le vert. Celui de l'indicateur de fréquence de traitement (IFT) établit que, pour LU, le nombre de traitements faits sur une culture est inférieur de 25 % à la moyenne nationale. Deuxième indicateur conseillé par le Muséum d'histoire naturelle : le nombre d'abeilles butinant à côté des champs. Albert Einstein peut dormir en paix : les abeilles reviennent puisque, au nombre d'un million en 2009, elles sont cinq millions en 2010. Enfin, troisième indicateur : les consommateurs, en quête de transparence, d'informations sur l'origine des produits, leur innocuité sur l'écosystème, plébiscitent le Petit Beurre LU puisque ses ventes progressent de 9 % en 2010.

Puisque l'harmonie semble établie, LU joue les prolongations. L'année 2011 accueille quatre nouvelles marques (Petit Ecolier, Cracotte, Pelletier et Heudebert) portant les volumes traités à 21 % du total LU dans, non plus une seule mais cinq usines ;
le nombre d'agriculteurs toujours sélectionnés à proximité des usines LU, passe à 650, les pratiques à 35, la superficie frôle les 10 000 hectares (9 800).
Preuve que "le champ des possibles" est plein d'espoir, les marques Prince, Paille d'or, Barquette 3 chatons, Pepito et Lulu Ourson rejoignent la gamme LU'Harmony en 2012.
Ces dix marques fabriquées dans 9 usines représentent 50 % des volumes LU. 930 agriculteurs travaillent sur 15 000 hectares et respectent 37 pratiques culturales.
Et les fleurs ? Le nombre d'hectares qui leur est consacré passe de 30 en 2009, à 340 en 2010 et à 450 en 2011.
Et demain ? "Notre objectif est de faire entrer en 2015 toutes les marques du portefeuille LU dans la filière LU'Harmony avec une surface globale de 30 000 hectares", confie Anne Génin.

Ouvrons-le-champ des possibles

Marque engagée

Lu Bastogne
Présent au Salon de l'agriculture depuis trois ans, LU témoigne de son engagement en faveur de la biodiversité à travers Les Champs de la biodiversité, créés en 2009 en partenariat avec la Fondation pour la recherche sur la biodiversité (FRB), émanation du Grenelle de l'environnement. "Nous lançons, tous les ans un appel à projets de recherche sur l'agriculture céréalière et la biodiversité. Trois sont sélectionnés et reçoivent une récompense de 100 000 euros. Ces réflexions nous donne des nouvelles pistes pour enrichir la charte de LU'Harmony, c'est un réservoir d'idées pour être toujours en avance", explique Anne Génin. Autre vivier d'idées : les ateliers de la terre, Global Conférence, dont la sixième édition s'est tenue du 26 au 28 septembre 2011 à Evian et pour laquelle LU est partenaire depuis trois ans. "C'est une vitrine pour notre marque, un lieu de rencontres et d'échanges avec des experts qui nous aident à mieux comprendre les enjeux, leur évolution et conforter notre avance sur notre initiative".
Pour complexes qu'ils soient, ces enjeux ne doivent pas être ignorés du grand public. Aussi, parallèlement à la communication TV et affichage qui joue essentiellement un rôle d'alerte à travers le thème de la bordure fl eurie, LU conçoit, en septembre 2010, un jeu sur internet, baptisé Les Harmonyculteurs (www.lesharmonyculteurs.fr). "Il s'agit de sensibiliser les consommateurs aux enjeux de la biodiversité sous la forme de jeux de rôle, ludiques et pédagogiques avec les conseils d'un agriculteur", explique Anne Génin. Le jeu a accueilli 320 000 visiteurs et a reçu le label "2010 année de la biodiversité", délivré par le ministère du développement durable.

lesharmonyculteurs.fr

Harmonie publicitaire

Diaporama
Janvier 2012 : un film publicitaire LU'Harmony met en scène...un agriculteur. Il s'inscrit dans une saga inaugurée en octobre 2011 sur le thème "Ouvrons le champ des possibles". "Jusqu'alors, nos quarante marques jouaient en solo et une vingtaine d'entreelles ne communiquaient pas.
L'heure est à l'esprit d'équipe sous l'ombrelle LU, les marques filles ont le même maillot", analyse Anne Génin. La campagne d'affichage sur quatre produits LU (le véritable Petit Beurre, Lulu l'ourson, La Paille d'Or et Petit écolier) propose la même signature, la même charte graphique, la même campagne. "C'est la première fois depuis 1998 que LU lance une campagne corporate. Avec la Coupe du monde de football et la victoire de la France, LU communiquait alors sur le thème de l'énergie en rassemblant un certain nombre de produits LU dans le même spot, signé BETC Euro RSCG", rappelle Marianne Hurstel, vice-présidente de BETC Euro RSCG. Aujourd'hui, LU communique toujours sur le thème de l'énergie, celle qui guide un groupe qui se forme autour d'un projet commun (6). Le film met en scène les habitants d'un quartier, de tous les âges, de tous les milieux et de toutes les couleurs (harmonie culturelle ?), rassemblant, avec une énergie contagieuse, des morceaux de tissus blancs pour les assembler (harmonie dans l'action ?) dans une grande toile, écran de cinéma, sur laquelle est projeté un film montrant un enfant s'engageant dans un champ de blé durable Harmony et indiquant ainsi le chemin de l'avenir, lui aussi durable, celui de la biodiversité. Ici, l'harmonie entre la ville et la campagne !
Très discrètement, en filigrane, une adolescente et une femme à la cinquantaine croquent un Petit Beurre quand un garçon savoure un Petit Ecolier. Pour autant l'objectif n'est pas de communiquer sur les produits mais sur la marque LU avec "un film de marque, une signature de marque et une posture de marque". Et l'ambition de "nourrir vos rêves, et avec l'énergie de chacun, ensemble les réaliser". "Marque positive, optimiste, pleine d'énergie, celle de ses biscuits, LU entend accompagner les gens dans leur désir de changement mais pas de manière révolutionnaire.
Il ne s'agit pas, ici, de changement idéologique, sociétal, de transformation du monde mais de changement à l'échelle humaine avec des petits gestes du quotidien pour donner envie d'aller de l'avant", explique Marianne Hurstel. Deux niveaux de discours se dégagent de la campagne : "le discours rationnel avec l'énergie que LU apporte avec le blé et le discours émotionnel grâce auquel LU réenchante le monde avec enthousiasme et optimisme". Après le premier film qui met en scène un projet collectif, des films viennent enrichir la saga en focalisant certaines personnes du premier film, associées à un produit : un petit garçon dégustant un Petit Ecolier, une fille et Paille d'or.
"La saga a pour objectif de créer une préférence de marque grâce au lien émotionnel tout en soulignant la supériorité qualitative des produits", résume Marianne Hurstel.

Des marques-produits à la meta-marque

"Pour susciter la gourmandise, rien de tel que de séduire l'oeil", recommandait Louis Lefèvre-Utile (7). A l'époque, le commerce était celui de la petite épicerie. Aujourd'hui, l'impact sur le linéaire des hypermarchés est déterminant qui impose d'éviter la dispersion. Forte de ses 40 marques et de ses 250 références, la marque LU se faisait plus discrète au profit de ses marques filles, Prince, Petit Ecolier, Granola, Pim's... Après Raymond Loewy, créateur du logo-type de LU en 1956 et l'agence Desgrippes, initiatrice en 1997 du "revers" jaune or faisant apparaître le logo LU comme un "rideau" qui se lève sur le produit et qui annonce "LU vous présente...", il revient à l'agence Dragon Rouge de concevoir une nouvelle identité.
"Nous avons voulu repartir des racines de LU, en recréant une connivence de la marque avec ses biscuits comme sur les packagings d'origine. LU prend le dessus sur le nom des produits qui enlacent le logo. La marque est mise en mouvement", explique Delphine Cadoche, directrice générale associée branding & packaging Dragon Rouge. Le slogan, "créateur de biscuits depuis 1846", ancre la marque dans son histoire, réhabilite l'esprit d'invention et entre en harmonie avec la nouvelle identité visuelle qui abandonne le "coin retourné" pour "aller de l'avant, montrer que la marque repart, reprend son leadership, ouvre le champ des possibles", ajoute Delphine Cadoche. "Chaque produit est porté par LU et présente son univers dans un esprit ludique et dynamique. Nous avons créé un concept packaging, le "play" qui fait jouer la marque avec ses biscuits." Le biscuit fait le lien entre la marque-mère et la marque-fille.
"Chaque packaging raconte une histoire ; chaque produit est valorisé en fonction de sa promesse." "Tous les produits à la marque LU sont bien sûr concernés par le changement de logo", précise Anne Génin. Rien de tel que de renouer avec l'esprit de famille pour redonner de la puissance en linéaire !

Notes

(1) p. 96, L'art du biscuit, Patrick Lefèvre-Utile, Hazan, 1995.
(2) Le couple Lefèvre-Utile appose depuis 1850 sur les emballages de ses produits son nom, associé à une représentation de la Renommée, une femme embouchant une trompette. Ce symbole, déposé officiellement en 1895, gage du renom de la marque, signera tous les produits jusqu'en 1943.
(3) La gamme bio La clé des Champs (2009), ainsi que L'arbre à biscuit (2006 et vendu en circuit spécialisé) sont retirés du marché. En période de crise, le consommateur arbitre !
(4) Louis Lefèvre-Utile enrage de voir les Anglais fonder leur notoriété dans les biscuits grâce à l'importation de matières premières bretonnes et vendéennes tels les oeufs, le beurre et le pur sucre de canne. L'heure est à la relocalisation : la maison Lefèvre-Utile entend faire du "Petit-Beurre LU" l'instrument de la reconquête des clients français. Nous avons échappé au "petit beurre bambin", son premier nom ! Rappelons que le premier petit écolier s'appelait "petit français" !
(5) Pour fabriquer La paille d'Or, Louis-Lefèvre Utile avait fait planter des framboisiers autour de l'usine nantaise pour avoir son propre sourcing !
(6) Selon un sondage CSA-LU conduit en septembre 2011 "Les Français et l'énergie des possibles", ces derniers veulent s'investir collectivement pour le changement. 62 % des Français se déclarent pleins d'énergie et 89 % ont envie que les choses changent.
(7) Op.cit., page 48.
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