La renommée de l'abbaye et de sa bière va grandir grâce aux Ducs de Brabant et aux donateurs comme Godefroy de Bouillon qui permettront de produire la bière en quantité. Au 18e siècle, l'Abbaye couvre un domaine de 8 260 hectares et produit quelques vingttrois brassins par an. Une bière blanche est brassée l'été, une brune l'hiver, une troisième, moins dense, est destinée aux pèlerins. Conséquence de la Révolution en 1789, l'invasion française marque la ruine de l'abbaye. Le 11 novembre 1796, les moines sont chassés et l'abbaye dévastée, démolie… Pour renaître, en 1870, quarante ans après l'indépendance de la Belgique (1830) quand les moines bénédictins retournent à Affligem pour reconstruire les bâtiments et la brasserie. La recette de la bière bien gardée, l'activité brassicole peut reprendre. La bière d'Affligem ne tarde pas à se faire une nouvelle renommée. Nouveau coup d'arrêt en 1917 quand l'armée allemande, en quête de cuivre, démonte les cuves et provoque la fermeture de la brasserie. Nouvelle renaissance après la Première Guerre mondiale, les moines relancent la brasserie pour la fermer de nouveau entre 1940 et 1945.
Peu de temps après, la communauté des moines étant moins nombreuse, Dom Robertus, alors prieur de l'Abbaye, décide de transmettre la recette à une brasserie laïque anversoise, De Hertog. En 1950, une nouvelle formule est élaborée qui permet d'utiliser un matériel moderne, tout en gardant le goût traditionnel de la bière : avec une accroche légèrement sucrée et une pointe d'amertume, la Formula Antiqua Renovata se distingue par sa robe caramélisée, intense et ses arômes de fruits mûrs, de miel, d'épices, de réglisse et de fleurs. Le 14 avril 1970, la fabrication de la bière retourne à Opwijk, à quelques lieues seulement de l'Abbaye, pour être confiée, sous licence concédée par les moines, à la brasserie De Smedt. Fabriquée par fermentation haute en cuve ouverte, la bière est élaborée à base de malt sélectionné, provenant d'orges blonds mûris aux alentours de l'Abbaye. Si la brasserie De Smedt, devenue Brasserie Affligem, est intégrée depuis 2000 au sein du groupe Heineken, pour autant, la bière est toujours brassée en Belgique selon les règles fixées par les moines qui veillent toujours sur sa qualité. Tous les ans, le brassin doit être approuvé par les moines. Sur le site www.affligembeer.be, des chants religieux accueillent les internautes !
Si Affligem représente moins de 1 % du marché alimentaire en GMS, la marque connait depuis les années 2000 une croissance régulière malgré des investissements publicitaires irréguliers. "Dans le portefeuille de marques du groupe Heineken, Affligem est une pépite et notre objectif est d'accélérer sa croissance", annonce Annick Vincenty, marketing manager spécialités (1). Cette ambition appelle une nouvelle plate forme de marque, une nouvelle communication et l'extension de Tripel en GMS. En France, la première identité de la marque mettait en scène, en 1998, les six brigands à chaque coin du packaging. "Si cela reflétait bien l'histoire de la marque, cette identité manquait d'impact, de visibilité, d'émergence", analyse Annick Vincenty. En 2002, la deuxième identité rapproche la marque de ses origines religieuses en mettant en valeur une main dans un trilobe - rosace composée de trois lobes en forme de trèfle - et tenant un verre de bière qui rappelle la tradition bénédictine de l'accueil et du don aux personnes de passage à l'abbaye. D'autres y verraient un calice et le geste eucharistique. "Elle vous est confiée", proclame la publicité.
Nouvelle identité en 2004 : il revient à l'agence CLTG, qui accompagne la marque depuis cette date, de donner un véritable statut à la marque. Première étape : de l'héritage du packaging précédent seul le trilobe en pierre est conservé mais avec une interprétation qui le fait passer d'une illustration à un symbole de marque, avec la dimension statutaire et de différenciation nécessaire. "Nous avons puisé une grande partie de notre inspiration dans l'analyse de l'histoire de l'Abbaye", explique Louis Comolet, président de l'agence CLTG. "Jusqu'à présent, la marque n'avait pas de "véritable" symbole établi. C'est en allant passer une journée sur place et en nous faisant guider par l'un des moines que nous avons découvert, dans l'obscurité d'une clé de voute du cloître, un trilobe doté du blason et des armes de l'Abbaye, de couleur rouge". Le blason portant les armes de l'abbaye (les clés de Saint Pierre et le glaive de Saint Paul), la devise Felix Concordia. Parmi les faits uniques définissant la marque relevés par l'agence figure la communauté monastique toujours vivante. Et l'existence de l'approbation de la recette de la bière par le Père Abbé. Un élément relevé par l'agence et qui a fait appel à un chercheur expert en latin médiéval du CNRS pour faire attester cette "imprimatur" du Père Abbé. Cette mention figure désormais sur le packaging et confère ainsi "une plus grande authenticité à la bière".
Deuxième axe qui vient nourrir la nouvelle ambition de la marque : son extension dans le haut de gamme traditionnel.
"Depuis une dizaine d'années, ce marché est en plein développement car on consomme moins mais mieux", analyse Annick Vincenty. Affligem Fruits rouges est lancé en 2008 en CHD et tous les ans, depuis 2001, Affligem propose un brassin de Noël, une tradition depuis le Moyen Age 3, disponible en CHD et en GMS. En 2009, Affligem Blonde est commercialisée dans un mini-fût pression de 5 l. compatible avec le système de bière pression pour la maison (Beertender). "Ce format est très apprécié et pèse de plus en plus dans les volumes de la marque". Enfin, Affligem Triple ou Tripel, commercialisé en CHD depuis 2008, est lancé en GMS en mars 2011 en pack de six. Affligem Triple, aux arômes confits et épicés, offre au nez un parfum de houblon et de malt et en bouche des saveurs douces et fruitées. Elle est deux fois fermentée en cuve et le dosage de matière première plus fort (le malt notamment) donne une bière plus forte (8.5°). La bière bouteille vendue dans les bars est refermentée en bouteille quand elle repose en chambre de fermentation, une pièce à température assez douce qui permet à la levure de générer une nouvelle fermentation dans la bouteille.
Troisième axe : la communication. Marque encore peu connue, Affligem voit sa notoriété croître progressivement (+ 10 points en 2010). "C'est en 2008 que pour la première fois Affligem communique sur la Belgique", mentionne Annick Vincenty. Depuis 2000, la marque communiquait sur le thème de la communauté monastique : "une bière d'abbaye divine. Elle vous est confiée" (2001/2002), une "bière de lumière" (2003/2004, Publicis) et "au coeur de l'abbaye" (2006). Avec l'agence Dufresne et Corrigan, le ton change : "la Belgique nous a offert Magritte mais surtout elle nous a offert la bière Affligem" (2008). Entre Noël 2010 et le jour de l'an 2011, Affligem choisit la radio pour communiquer sur la qualité du produit et sur la Belgique, référence de qualité en matière de bière. Le slogan "la savoureuse minute belge" rappelle qu'il faut une minute pour apprécier les saveurs de la première gorgée de bière. Sur le plan affichage, la marque communique cette idée avec le sablier. "Nous choisissons la radio pour construire la notoriété et la presse pour le territoire de marque". Sur les affiches, les codes couleur, le rouge, le jaune, le noir, couleurs de la Belgique.
Et à la radio, si l'on tend bien l'oreille, l'accent est...?
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