Tout d'abord l'animal peut être choisi car il est le destinataire du produit promu. C'est le cas du petfood où Canigou met en scène un chien dans sa publicité pour montrer qu'il vend de la nourriture pour chiens. En second lieu, une marque peut choisir de faire figurer un animal car il présente des caractéristiques ou qualités qu'on doit prêter à son produit. Ainsi la marque d'adoucissant Cajoline utilise l'ourson pour signifier qu'elle apporte autant de douceur qu'un ourson. Il est également arrivé à la marque Jaguar de montrer l'animal dont elle porte le nom afin de signifier la puissance et la rapidité des véhicules qu'elle vend.
Ensuite, l'animal peut être employé non plus pour sa connexion directe avec le produit mais avec le message que veut faire passer la marque. Ainsi, Danone utilise dans sa dernière publicité pour Actimel des images réelles de kangourous, baleines, lions et ours polaires protégeant leurs petits au service d'un nouveau slogan : "protéger est le plus naturel des gestes". L'animal est donc ici mis au service du message que fait passer la marque, il constitue un argument qui prouve la véracité de ce qu'affirme Actimel : ainsi, la lionne protège son lionceau comme une mère protège son enfant en lui donnant un Actimel. La quatrième raison porte sur les publicités où figurent des animaux représentants de la marque promue. La marque Frosties par exemple a la chance de posséder son animal propre, ce tigre au ruban rouge, qui n'appartient qu'à elle et qui suffit à l'identifier. Elle aurait donc tort de se passer de cet atout dans sa publicité. C'est ainsi que les marques qui possèdent un personnage de marque l'emploient dans leur publicité à l'image de La vache qui rit ou de Nesquik et de son lapin Quicky. Notons toutefois que les limites ne sont pas étanches des catégories décrites ; il est en effet possible de trouver plusieurs explications à l'emploi d'un animal dans une publicité.
La vache qui rit est par exemple présente dans les communications de la marque en sa qualité de personnage de marque, mais aussi parce qu'elle nous dit quelque chose du produit, et notamment qu'il s'agit d'un produit laitier.
Une dernière utilisation des animaux dans la publicité reste à décrire, et pourrait être illustrée par le singe des publicités Omo. Il ne semble pas exister de lien a priori entre ce singe et le produit, à savoir de la lessive, ni entre l'animal et la marque. Le singe n'est pas un argument mais une illustration humoristique et impactante du message de la marque. Si toutes les marques sans distinction peuvent faire l'usage dans leurs publicités d'animaux et le font pour des raisons différentes, ajoutons qu'elles ne choisissent pas toutes la même manière de les mettre en scène. On retrouve ainsi des ours polaires à la fois dans la dernière publicité d'Actimel et dans le film publicitaire que diffuse Coca-Cola au moment des fêtes sans pour autant que ces ours se ressemblent. Outre le fait qu'ils ne soient pas employés à la promotion de la même marque, quelles sont les différences entre ces ours ?
L'analyse de l'utilisation de ces mammifères par Coca-Cola et Actimel peut se faire sous deux angles. Le premier se rapporte à la forme sous laquelle l'animal nous apparaît et se traduit par le choix pour la marque de se situer, au travers de sa publicité, dans la présentation de l'animal ou dans sa représentation. Dans le premier cas, l'animal nous est présenté tel que nous pourrions le voir si nous étions à la place de la caméra qui le filme. C'est précisément le cas de la publicité d'Actimel dans laquelle la présence de l'ours polaire a nécessité l'existence d'un ours polaire en chair et en os, puisque les images de l'animal ont été filmées. En revanche, rien de tel dans la campagne de fin d'année de Coca-Cola qui prend la forme d'un film animé. Aucun risque qu'un animal n'ait été maltraité durant le tournage puisque les ours ont été créés de toute pièce et sont au service d'une publicité qui prend la forme d'une fiction. Nous aboutissons donc à une première opposition entre des ours polaires incarnés ou représentés.
Le deuxième critère pour analyser l'usage de l'ours polaire dans ces deux campagnes publicitaires est davantage relatif au fond, c'est-à-dire non plus à la forme que prend l'animal, mais à l'existence de l'animal qui est présenté ou représenté. La distinction se fait ici entre existence réelle ou fictive. Ainsi, nul doute n'est possible sur le caractère fictif de l'existence d'ours polaires buvant du Coca-Cola à la bouteille après avoir pris soin de la décapsuler à l'aide d'un croissant de lune. En revanche, les ours d'Actimel ont une existence tout à fait réelle en cela qu'ils sont présentés tels que nous pourrions les observer dans la réalité.
Ainsi, les ours de Coca-Cola ont une existence fictive et nous apparaissent sous la forme d'une représentation d'ours polaires. Au contraire, Actimel présente de vrais ours dans une publicité qui les met en scène tels qu'ils existent dans la réalité. Il nous reste donc à décrire deux cas : le premier est celui dans lequel des animaux qui n'existent pas dans la réalité nous sont présentés sous une forme qui elle est réelle. Le singe des lessives Omo illustre notamment ce cas de figure : en effet, pour les besoins de la publicité, un vrai singe avait été affublé de vêtements, filmé, puis on l'avait par la suite doté de la parole au montage. Cela signifie donc que sur la forme, il s'agissait effectivement d'un véritable singe mais l'animal tel qu'il nous est présenté dans la publicité, pourvu de vêtements et de la parole, n'existe pas dans la réalité.
Enfin, le dernier cas est celui dans lequel un animal aux caractéristiques bien réelles et fidèles à ce dont la nature l'a doté apparaît dans la publicité sous la forme d'une représentation plutôt que d'une incarnation par un véritable animal. C'est ainsi que le chat des publicités pour la marque Félix ressemble à un chat, a des attitudes de chat mais la forme réelle n'a pas été choisie pour le mettre en scène dans la publicité ; plutôt que de filmer un chat, la marque a préféré réaliser un film animé où Félix est une représentation dessinée de félin. Nous pouvons résumer ces quatre cas dans le tableau suivant :
Notons toutefois que cette typologie n'est pas figée dans le temps. Tout d'abord, elle n'aurait pas eu lieu d'être aux débuts de la publicité car il était à l'époque techniquement impossible de photographier ou de filmer des animaux et donc de les présenter sous leur forme réelle. En outre, il deviendra sans doute de plus en plus difficile dans le futur de discerner si l'animal est incarné ou représenté tant les animations 3D permettent aujourd'hui de proposer des représentations extrêmement proches de la réalité. En revanche, il est certain qu'animaux domestiques et bêtes sauvages continueront d'habiter la publicité tant l'appropriation par le consommateur de ces personnages animaliers est importante.
La marque de pain d'épices Vandamme ne nous contredira pas, elle qui dut faire face à l'incompréhension et la déception des aficionados de l'ourson Prosper lorsqu'elle décida se séparer de lui...
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