R.R. : La fidélisation est un challenge quasi impossible. On parle beaucoup de la fragmentation des médias. On peut en dire autant de la consommation : excepté les produits indispensables, les consommateurs naviguent dans l'univers des marques en fonction de variables multiples. Leurs attitudes ne sont plus maîtrisables, spécialement les jeunes, qui, aujourd'hui très compétents pour décrypter les campagnes publicitaires, ne sont plus fidèles.
R.R. : Autrefois les règles pour fidéliser le client étaient globalement au nombre de trois : elles ne sont plus pertinentes. Il fallait d'abord satisfaire le client. Or aujourd'hui, la satisfaction client est un acquis pour le consommateur, c'est un contrat de base. De surcroît, la notion de fidélité a changé aussi bien dans la vie courante que dans l'acte d'achat. Deuxième règle : on disait d'une marque que, pour être fidèle elle devait être toujours en innovation ! Soit, mais là aussi, le consommateur est devenu un expert à qui on ne raconte pas n'importe quoi : un yaourt ne va pas améliorer la peau ! Enfin, la technologie est un tonneau des danaïdes : les programmes CRM (customer relationship management) destinés à fidéliser sont de véritables usines à gaz. Aucun programme n'est rentable aujourd'hui, la technologie est devenue très compliquée.
R.R. : Aujourd'hui, la marque est en permanence en recrutement car fidéliser est trop cher ou trop compliqué compte tenu de son environnement plus complexe aujourd'hui : le concurrent peut être dans un autre marché. La fidélité, c'est la problématique du consommateur, ce n'est pas celle de la marque. Exemple : Red Bull est constamment en recrutement sur le sport extrême sans jamais fidéliser. Ici, la fidélisation c'est la conséquence. Pour recruter il faut travailler le contenu de marque, la posture de marque, être dans l'air du temps, être toujours en phase avec la promesse de la marque, la vérité de la marque. Le consommateur perçoit tout de suite ce qui sonne juste ou faux, il voit si la marque est dans le vrai, l'authentique. Red Bull sponsorise du sport extrême et pas le pèlerinage à Lourdes !
R.R. : Ils ont cette capacité à transformer un individu en un média (cf l'affaire Kit Kat et l'huile de palme). Avec Twitter l'information est démultipliée par le transfert, la confidentialité n'existe plus. Les frontières n'existent plus. Les nouveaux outils technologiques ont rendu caduque la chaîne traditionnelle selon laquelle un consommateur passe sur un média pour voir une information sur une marque. Aujourd'hui, le consommateur diffuse lui-même l'information. Une marque peut donc passer par un consommateur pour parler à un média. Un média peut passer par une marque pour parler à un consommateur. Un consommateur peut passer par un média pour parler à une marque. De toute façon, les consommateurs font d'abord confiance aux autres consommateurs, les experts qui "savent", avant de faire confiance à la marque. Le bouche à oreille est redoutable.
R.R. : Un journaliste spécialiste de sport extrême en saura plus en passant par les comptes Twitter de Red Bull qu'en tapant "sport extrême" sur internet. En nourrissant la marque par des informations sur le sport extrême, la marque devient media, le passage obligé pour une passion. La marque crée sa propre audience ! Après l'ère du marketing opérationnel (la marque proche des gens), puis celle du CRM, nous entrons dans celle de l'audience relationship management. L'audience d'une marque se mesure par sa capacité à être en permanence, 24 h sur 24, confronté à un consommateur, sans relâche.
R.R. : S'il n'existe pas de règles pour fidéliser, du moins certains principes doivent être respectés. L'entreprise doit être fidèle à son client ! Elle doit se montrer responsable tant sur le plan du management que sur celui des produits (composition contre l'obésité, origine des produits , etc.). Si elle doit être réaliste dans son action quotidien, elle ne doit pas s'empêcher de surprendre, faire rêver, faire sourire. La prime à la surprise existe. L'entreprise doit être fière de ses racines et les mettre en avant comme le fait par exemple Peugeot pour ses 200 ans. Elle doit avoir un message clair et vrai, sans dissonance car tout se vérifie sur internet. Elle doit être économe, comme le consommateur qui lui aussi arbitre entre ses différentes dépenses. L'entreprise ne peut plus dire "mes consommateurs sont" car ils ne lui appartiennent pas, la préférence ne se décrète pas. Il faut, au contraire, laisser parler le consommateur sur les blogs car lorsqu'on est en présence d'un fan ou d'un expert, souvent les deux, la marque tient alors son meilleur vecteur de communication. Car il peut encourager des amis à devenir également fans comme lui et clients de la marque. Et, peut-être… fidèles !
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