La saisie-contrefaçon (article L.716-7 du CPI) pourra aboutir comme auparavant à la description détaillée, avec ou sans prélèvements, ou à la saisie réelle des produits ou services prétendus contrefaisants,mais également – et il s'agit d'une nouveauté – à la saisie réelle des matériels et instruments utilisés pour produire ou distribuer les objets contrefaisants, ainsi que de tout document s'y rapportant. Par ailleurs, le délai pour saisir le juge après une opération de saisie-contrefaçon va désormais être fixé par voie réglementaire et non plus être inclus dans la loi même. Le respect de ce délai est important car, à défaut, l'intégralité de la saisie peut être annulée à la demande du saisi. Enfin, la personne qui s'estime victime d'actes de contrefaçon et cherche à en établir la preuve peut désigner des experts (en général il s'agira de conseils en propriété industrielle) afin d'assister l'huissier lors des opérations de saisie-contrefaçon.
"Si les éléments de preuve, raisonnablement accessibles au demandeur, rendent vraisemblable qu'il est porté atteinte à ses droits ou qu'une telle atteinte est imminente" (article L.716-6 du CPI), le juge saisi en référé ou par voie de requête1, peut prendre, à l'encontre du prétendu contrefacteur ou des intermédiaires dont il utilise les services, un certain nombre de mesures de nature à faire cesser une atteinte aux droits de propriété intellectuelle invoqués : interdire la poursuite des actes argués de contrefaçon, exiger une garantie destinée à assurer l'indemnisation éventuelle du demandeur, ordonner la remise des produits contrefaisants entre les mains d'un tiers aux fins d'empêcher leur introduction ou leur circulation dans les circuits commerciaux, allouer une provision lorsque l'existence du préjudice du demandeur n'est pas sérieusement contestable. En outre, le juge peut,"si le demandeur justifie de circonstances de nature à compromettre le recouvrement des dommages et intérêts", ordonner la saisie conservatoire des biens mobiliers et immobiliers du prétendu contrefacteur, y compris le blocage de ses comptes bancaires et autres avoirs. Cet éventail de mesures permet de limiter dans les meilleurs délais les effets d'actes de contrefaçon ; néanmoins afin que ces mesures puissent perdurer, il conviendra, si elles ont été ordonnées avant tout procès au fond, qu'elles soient suivies, dans un délai à déterminer par voie réglementaire, d'une saisine du juge au fond, à l'instar de l'exigence existant en matière de saisie-contrefaçon.
Compte tenu des possibilités offertes à la victime d'une contrefaçon, le juge peut "subordonner l'exécution des mesures qu'il ordonne à la constitution par le demandeur de garanties destinées à assurer l'indemnisation éventuelle du défendeur si l'action en contrefaçon est ultérieurement jugée non fondée ou les mesures annulées".
Le tribunal compétent en matière de contrefaçon de marque demeure le tribunal de grande instance ; néanmoins un décret doit préciser quels tribunaux seront précisément compétents, à l'instar de ce qui existe en matière de brevets (article L. 716-3 du CPI).
Un droit à l'information est créé par l'article L. 716-7-1 du CPI, permettant aux juges du fond saisis d'exiger du contrefacteur ou de personnes trouvées en possession de marchandises contrefaisantes ou de personnes qui ont été signalées comme intervenant dans la production, la fabrication ou la distribution de ces produits, qu'ils fournissent des informations sur les quantités et prix de ces marchandises, sur leurs détenteurs antérieurs et leurs destinataires, l'objectif étant de remonter et de démanteler les réseaux. Ce droit d'information sera toutefois soumis à une certaine bonne volonté de la part des personnes interrogées, lesquelles préféreront peut-être s'acquitter d'une astreinte plutôt que de fournir des informations gênantes. Par ailleurs, ce droit d'information peut être neutralisé s'il existe un "empêchement légitime". Le contour de cette notion, qui évoque le secret des affaires, devra être défini par les juges.
L'évaluation du préjudice subi par la victime de la contrefaçon est désormais facilitée par les articles L. 716-13 à L 716-15 du CPI.
En effet, la nouvelle loi précise :"Pour fixer les dommages et intérêts, la juridiction prend en considération les conséquences économiques négatives, dont le manque à gagner, subies par la partie lésée, les bénéfices réalisés par le contrefacteur et le préjudice moral causé au titulaire des droits du fait de l'atteinte. (...)"
La prise en compte des bénéfices réalisés par le contrefacteur est une nouveauté et a clairement pour objectif de décourager le contrefacteur, puisqu'il peut être condamné à réparer plus qu'il ne le devrait si on s'en tenait à la règle précédemment appliquée de ne réparer que le préjudice subi par la victime des actes de contrefaçon. Par ailleurs la loi a prévu une alternative : "(...) Toutefois, la juridiction peut, à titre d'alternative et sur demande de la partie lésée, allouer à titre de dommages et intérêts une somme forfaitaire qui ne peut être inférieure au montant des redevances ou droits qui auraient été dus si le contrefacteur avait demandé l'autorisation d'utiliser le droit auquel il a porté atteinte."
Ce système de forfait vient en aide à la victime, qui n'a pas ou a peu de preuves de l'étendue de la contrefaçon, ou dont la marque n'a pas été encore exploitée, ce qui était auparavant de nature à réduire sensiblement le préjudice. Par ailleurs, la loi prévoit, à côté de la réparation en termes de dommages et intérêts, le droit pour la victime des actes de contrefaçon de solliciter le rappel des marchandises contrefaisantes, ainsi que des matériaux ou instruments ayant permis de les fabriquer, des circuits commerciaux ; la confiscation ou la destruction des marchandises. En outre, les mesures de publicité de la décision, y compris sur Internet, sont généralisées.
L'arsenal juridique de lutte contre la contrefaçon ayant été renforcé, il convient désormais d'observer de quelle façon il va être utilisé et interprété, étant précisé qu'il sera complété par un volet pénal dans les années à venir, la loi du 29 octobre 2007 ayant en effet une dimension essentiellement civile.
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