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Revue des Marques - n°57 - janvier 2007
 

Autodiscipline publicitaire : Le BVP veille

Le Bureau de Vérification de la Publicité (BVP) œuvre pour une publicité responsable. L'organisme, né en 1953, prône l'autodiscipline des annonceurs pour une publicité “loyale, saine et véridique”.
Entretien avec Joseph Besnaïnou, directeur général du BVP.

PROPOS RECUEILLIS PAR ANNE-SOPHIE LE BRAS ( ICAAL)

le BVP veille

Quel est le rôle du BVP ?

Joseph Besnaïnou : Le Bureau de Vérification de la publicité est une association interprofessionnelle créée et financée par des professionnels : les annonceurs, leurs marques, les agences et les médias. Son ambition est double. La première est de créer, en collaboration avec ces annonceurs, les règles déontologiques qui encadrent le discours publicitaire, soit en complétant les lois existantes, soit en s'y substituant dans le cas où la législation manquerait. La seconde est évidemment d'aider nos adhérents – un peu moins de 1 000 à l'heure actuelle - à appliquer ces règles quelque soit le domaine et les supports (affichage, presse, radio, télévision). En matière télévisuelle, notre rôle reste plus prégnant dans la mesure où, depuis une quinzaine d'années, l'accord signé avec le CSA engage les régies à soumettre au BVP les publicités pour un contrôle “a priori” de l'ensemble de la production publicitaire. Par conséquent, toutes les publicités diffusées sur les chaînes ont reçu un avis du BVP, favorable ou défavorable. Il est rare que notre opinion ne soit pas suivie, même si la liberté éditoriale des chaînes reste entière. L'année dernière, environ 15 000 publicités télévisées finalisées et prêtes à être diffusées ont été visionnées par le BVP ; nous dépasserons, cette année, les 16 000.

L'année dernière, environ 15 000 publicités télévisées finalisées et prêtes à être diffusées ont été visionnées par le BVP ; nous dépasserons, cette année, les 16 000.

Avec quels moyens pouvez-vous agir ?

J.B. : Nous sommes une petite structure composée notamment d'une dizaine de juristes. Nous rédigeons des recommandations en collaboration avec les annonceurs, les agences et les médias. Il en existe une quarantaine à l'heure actuelle. Environ 30 000 projets nous arrivent annuellement avant leur réalisation ou avant leur diffusion. Par la pédagogie, par les conseils que nous donnons avant diffusion, nous agissons pour que la publicité soit loyale, saine et véridique. Après diffusion, il nous est possible de parvenir à faire cesser des campagnes, essentiellement en agissant sur le diffuseur. Cela est déjà arrivé, même si c'est assez rare. Nous pouvons également nous autosaisir de publicités en dehors de la télévision à la suite de plaintes de consommateurs. Ce n'est pas dans l'intérêt de l'annonceur que le consommateur soit conduit à se détacher de la publicité.

Quelles sanctions sont prévues ?

J.B. : Nous ne sommes pas un instrument de droit public, ni de droit positif. Aucune sanction n'est, par conséquent, prévue. Le BVP est un organisme d'autodiscipline, c'est-à-dire qu'il agit pour une limitation du discours librement consentie par les annonceurs et par les acteurs de la publicité. Il n'est pas question de sanctions. Notre rôle majeur est d'empêcher la diffusion d'une publicité qui n'est pas en accord avec la loi, bien sûr, mais surtout avec les règles déontologiques. En télévision, par exemple, des centaines de publicité chaque année ne passent pas. Des milliers de projets qui nous sont soumis sont modifiés à notre demande pour être conformes aux règles que nous avons établies. Nous pensons que l'autodiscipline fonctionne aussi bien que la loi, si ce n'est mieux, surtout en matière publicitaire.

Sur quelles problématiques travaillez-vous actuellement ?

J.B. : L'établissement de la loi de santé publique sur les messages nutritionnels nous préoccupe le plus à l'heure actuelle. Nous réfléchissons beaucoup avec les annonceurs sur ce sujet puisque le décret a prévu que ces messages nutritionnels respecteraient les règles d'autodiscipline de la profession. Nous œuvrons également pour la lutte contre l'obésité : puisqu'il y a une certaine prise de conscience sur ce danger, nous nous devons d'être vigilants. Depuis 2003, nous avons mis en place une nouvelle règle déontologique liée au comportement alimentaire des enfants véhiculé par les publicités. Nous avons préconisé la fin d'un certain nombre d'équivalences, ainsi que d'arrêter de montrer une consommation excessive ou un grignotage passif devant une télévision ou un jeu vidéo, incitant ainsi les messages publicitaires à exposer une alimentation équilibrée. Viendront se rajouter les messages sanitaires.
Nous nous sommes véritablement mobilisés et avons modifié les règles deux fois en deux ans à la demande du PNNS, qui a reconnu d'ailleurs que le problème n'était plus dans le discours publicitaire lui-même. En effet, il réside maintenant dans le nombre de publicités pour enfants. Mais nous ne rentrons pas dans cette problématique, notre champ de compétences se limitant au discours publicitaire. Nous ne maîtrisons ni sa diffusion, ni son plan média, ni son volume. Nous avons également travaillé sur l'arrivée de la distribution à la télévision depuis le 1er janvier. Une grille de lecture commune à toute la profession a été mise en place par nos soins, un vrai texte de responsabilités collectives qu'il a fallu mettre en musique.

La promotion étant interdite, il a fallu définir ce qu'était une opération de promotion. Un prix est-il forcément promotionnel ? Pour nous, ce n'est pas le cas.

Qu'en est-il dans ce domaine ?

J.B. : A la suite de la modification du décret au 1er janvier 2004 ouvrant aux distributeurs le droit à la publicité, nous avons travaillé pour rendre la publicité la plus attractive possible et dans laquelle le discours pourrait être le plus large possible. Notre rôle n'est pas d'empêcher le discours publicitaire. Néanmoins, parmi nos adhérents, les regards sur l'entrée de la distribution en publicité sont divergents, certains y sont favorables comme les télévisions et les agences, d'autres non. Parce que le décret énonçant des grands principes était forcément difficile à décrypter, une longue réflexion a été nécessaire, conduisant à la création d'une grille de lecture commune à la profession sur ce que peut faire et ne peut pas faire la grande distribution.

La promotion étant interdite, il a fallu définir ce qu'était une opération de promotion. Un prix est-il forcément promotionnel ? Pour nous, ce n'est pas le cas. Toutefois, dans la mesure où ce prix est pérenne, il faut que les stocks le soient aussi. Des centaines de projets nous arrivent actuellement, il y a manifestement une effervescence. D'ailleurs nombre de distributeurs nous ont rejoint au BVP afin de communiquer clairement et éviter de futurs contentieux. Tout le monde semble d'accord sur la lecture commune du décret. Ce texte est extrêmement responsable.

La représentation de la femme en publicité vous préoccupet-elle toujours ? Dans quel sens a-t-elle évolué ?

J.B. : Nous avons une sorte de co-régulation avec les pouvoirs publics ainsi qu'avec le ministère chargé de la parité. Les problèmes sont de moins en moins nombreux. Nous ne sommes pas pour autant un institut moral qui pointerait du doigt la trop grande présence de femmes nues par exemple. L'important reste que l'image de la femme ne soit pas dégradée et qu'il n'y ait rien d'intentatoire à sa dignité. L'année dernière, 100 000 publicités ont été montrées à des stagiaires et, sur ce nombre, seulement 19 ont posé des difficultés. Il y aura néanmoins toujours des tentations. Le “porno chic” qui nous préoccupait encore il y a quelques temps a été quasiment éradiqué. Chaque année, le ministère chargé de la parité nous donne quitus de notre action, jugeant l'autodiscipline comme étant la meilleure action, malgré une vieille tentation de légiférer.

La multiplicité des médias complique-t-elle votre contrôle ?

J.B. : La prolifération des médias peut devenir une véritable difficulté. Nous devons leur faire comprendre que leur intérêt est de s'autodiscipliner. Exception faite de la télévision où il y a un contrôle a priori, tous les autres médias sont au même niveau. L'important reste que les annonceurs aient conscience en amont qu'ils ne peuvent pas faire n'importe quoi. Un long travail de pédagogie est à entreprendre dans ce sens. Le problème se pose rarement avec les grandes marques et les grands annonceurs qui ne peuvent pas se permettre de respecter les règles à la télévision et faire l'inverse sur d'autres supports. Le risque de présence de publicité qui ne prendraient pas en compte nos recommandations est plus élevé dans des médias qui ne coûteront pas cher. Mais nous comptons beaucoup sur les consommateurs pour nous avertir. Nous prendrions alors position. Encore une fois, nous ne sommes pas dans un système de sanction, mais dans un système de prise de conscience. D'ailleurs celui-ci fonctionne partout en Europe, malgré bien sûr quelques manquements. Ce n'est pas parce qu'il y a des lois que les hold up n'existent pas.

L'Alliance Européenne pour l'Ethique en publicité garde comme ambition de faire prendre conscience à l'Union Européenne que l'autorégulation reste le bon système.

Justement, une harmonisation européenne de ces règles est-elle prévue ?

J.B. : Nous ne souhaitons pas une harmonisation. Il existe le même genre d'organismes d'autodiscipline partout en Europe regroupés au sein de l'Alliance Européenne pour l'Ethique en publicité, actuellement dirigée par Jean-Pierre Teyssier, président du BVP. L'objectif n'est pas de disposer d'un texte commun car les sensibilités restent différentes selon les pays, mais de mener des actions communes, en faveur de l'autodiscipline. L'Alliance garde comme ambition de faire prendre conscience à l'Union Européenne que l'autorégulation reste le bon système. Et cela fonctionne puisqu'elle est prise en compte dans l'évolution de la directive “télévision sans frontière”. Il y a du travail parce que les consommateurs au niveau européen sont aussi extrêmement vigilants.

La publicité indirecte rentre-t-elle dans votre champ d'actions ?

J.B. : Non. Notre action se limite à la publicité qui dit ce qu'elle est, dans les endroits où elle est matérialisée comme publicité. S'il y a un problème autour des stades par exemple, le CSA doit s'en saisir. Nous travaillons sur le seul message publicitaire, que ce soit à la radio, à la télévision ou en presse.

Dans quels domaines vos recommandations ont le plus évolué ?

J.B. : La cosmétique. Les discours et les promesses ayant évolué, les règles ont logiquement suivi la tendance. Par ailleurs, notamment dans le domaine de la téléphonie, les mentions et renvois nous interpellent beaucoup en ce moment. Les consommateurs y sont très sensibles. Nous menons une vraie action dans ce domaine depuis quelques mois, qui nous amène à délivrer des avis négatifs pour que le consommateur ne se sente pas floué. Même si les mentions ne doivent pas prendre autant de place que le message publicitaire, elles doivent être lisibles et distinguables par le consommateur.

Et dans l'avenir ?

J.B. : Une mauvaise publicité nuit à toutes les bonnes. Nous risquons à l'avenir d'être, par exemple, confrontés aux problèmes - de plus en plus rares - des représentations religieuses à cause de la montée du communautarisme. Par ailleurs, la publicité doit être de plus en plus à l'écoute des consommateurs. Avec le foisonnement des canaux publicitaires, les annonceurs doivent prendre en compte le consommateur tout en gardant une bonne publicité. Seule la télévision peut contrôler en amont. Mais le manque d'homogénéisation entre les différents médias est un risque et nous devons nous en préoccuper.


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