Les chiffres sont têtus et personne ne peut plus contester la prise de position d'Internet en tant que média. A fin 2005, il représente déjà 5,9 % du marché publicitaire (cf. encadré) suite à une croissance de ses revenus bruts de 74 % par rapport à 2004 quand le marché plurimédia évoluait de +5,9 %. Déjà, en 2004, Internet avait connu un bond de 78 % par rapport à l'année précédente. Ces excellents chiffres doivent en plus être tempérés par le fait que TNS Media Intelligence ne mesure que la seule activité publicitaire (bannières, boutons, sponsoring, opérations spéciales) sur Internet et ne traite donc pas les liens sponsorisés. Cette déferlante du média Internet et des nombreux sites qu'il abrite consacre définitivement le morcellement progressif du marché publicitaire. Il semble évident, aujourd'hui, que le phénomène d'atomisation des médias soit irréversible. Si la presse est historiquement coutumière du fait par une segmentation toujours plus fine de son offre (l'APPM site le nombre de 466 nouveaux magazines lancés pour la seule année 2005, soit une hausse de 4,5 % vs 2004), le phénomène touche de plus en plus l'audiovisuel poussé par l'émergence de nouvelles technologies.
Bien évidemment ce tour d'horizon de la fragmentation ne serait pas complet sans évoquer le (futur) nouveau grand média, à savoir Internet. Sa force réside tout à la fois dans sa capacité à être un média “one to many” que “one to one”. Selon les technologies utilisées, l'annonceur pourra, dès la mise en ligne de sa publicité, mesurer les premiers retours sinon sur investissements au moins sur l'intérêt suscité par sa campagne. Progressivement les tabous tombent un à un, et l'on constate une montée en puissance du média Internet pour les produits de grande consommation. Certes, la part que ces annonceurs consacrent au média reste encore bien modeste (1,7 % vs 77,6 % pour la télévision) mais la phase d'expérimentation est aujourd'hui terminée et Internet s'invite dans les stratégies médias. Entre 2004 et 2005 les sommes investies sur ce média ont doublé pour l'alimentaire, ont été multipliées par 2,4 pour la toilette beauté, par 6 pour les boissons et par 4 pour l'entretien, alors que dans le même temps les investissements totaux de ces secteurs plongeaient de 8,4 %. En 2005, Internet est le seul média à avoir ainsi résisté aux coupes budgétaires des annonceurs de la grande consommation.
Au final, sur l'ensemble des secteurs, le média Internet a accru son portefeuille annonceurs de 30 % entre 2004 et 2005 et de 57 % en trois ans. Cela prouve bien le référencement de plus en plus fréquent du média dans les stratégies des marques. Après ce rapide tour d'horizon flatteur sur l'atomisation des médias, il convient cependant de remettre quelques données à leur juste place : malgré ce phénomène général de morcellement, les recettes brutes des médias restent encore bien concentrées. En télévision, les six chaînes hertziennes nationales représentent encore 90 % du média télévision. En presse magazine, 15 titres sur les 334 étudiés par TNS couvrent 38 % des recettes du média. En radio, les trois principales stations représentent 41 % des recettes du média sur les 19 stations nationales mesurées. Et même sur Internet, malgré l'offre pléthorique de sites, les portails et moteurs de recherches couvrent à eux seuls 34,2 % du média devant les fournisseurs d'accès (28,6 %). Or ces deux catégories de sites abritent moins de 10 sites qui s'arrogent près de 63 % des recettes du média.
On peut alors conclure qu'il existe non seulement un morcellement de l'offre publicitaire mais aussi que cela est clairement visible dans la mesure des investissements consacrés par les annonceurs. Mais ces derniers restent prudents car l'émergence de leurs marques est, certes, primordiale mais il existe une incontestable prime aux leaders, à ceux qui prouvent, chiffres à l'appui leur force et leur intérêt pour la marque. Là encore Internet aura été un bon exemple, car après des sur promesses, il aura fallu cinq longues années et une certaine “rentrée dans le rang” pour qu'enfin les annonceurs non technologiques y arrivent en masse. Les instruments de mesure, à commencer par l'audience, sont donc d'autant plus utiles pour rassurer. Le mouvement d'atomisation s'amplifiera certainement à l'avenir avec le développement du média téléphone mobile, mais la seule modernité ne suffira pas à convaincre les annonceurs.
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