Le joaillier Van Cleef & Arpels fête cette année son centenaire et ouvre son premier site. Quelles sont les raisons qui ont présidé à cette ouverture ?
Quel fut le parti pris de la marque ?
E.J. : Nous sommes arrivés tard sur Internet car Van Cleef & Arpels, maison plurielle, qui a une part de mystère et de magie, nécessite une théâtralisation que la technologie ne pouvait, jusqu'à une date récente, mettre en œuvre. Deuxième raison : le taux d'équipement est aujourd'hui très élevé qui permet de toucher davantage de clientes. Nous pouvons donc exprimer la maison avec sa part de rêve. Ce site est un site d'initiation et surtout pas un catalogue en ligne. Il exprime la pluralité de Van Cleef & Arpels, gemme à plusieurs facettes. L'arborescence florale permet d'exposer grâce à des mini sites dans le site, les différents univers.
Christine Santarelli : Nous avons travaillé le site comme une pièce de joaillerie, une balade poétique dans l'univers végétal, présent chez Van Cleef & Arpels depuis ses origines. La marque souhaitait éviter le discours didactique et linéaire et privilégier dans une dimension impressionniste son univers intimiste. Van Cleef & Arpels est d'abord une histoire d'émotion avant d'être une démarche intellectuelle. Il faut suggérer plutôt que démontrer. Nous avons donc mis en scène les collections comme une pièce de théâtre en respectant les codes du luxe sur Internet : particularité, unicité, différence, sophistication, émotion. Le haut débit et le système flash, véritables ruptures technologiques, permettent de présenter autrement les images, les animations et le son.
Le luxe est, dit-on, synonyme de distance. Est-ce compatible avec Internet ?
E.J. : Depuis juillet 2005, 100.000 personnes (un tiers Europe, un tiers Etats-Unis, un tiers Asie) sont entrées dans l'univers de la maison grâce au site avec un taux de présence de neuf minutes et parmi elles, beaucoup qui jusqu'à présent n'osaient pas franchir la porte du temple. Luxe et proximité ne sont pas incompatibles et nous souhaitons enrichir le site en donnant la possibilité à l'internaute de communiquer avec nous. Soulignons que notre site est en français, anglais, japonais, russe et chinois !
C.S. : C'est un faux débat car c'est plus une affaire de ton et d'attitude que de distance réelle. Oui, Internet donne l'occasion à la marque d'être en contact direct avec les clients sans être familier. L'objectif n'est pas de garder de la distance mais de parler de ce que l'on est et de ce que l'on fait en montrant les pièces exceptionnelles. Grâce à Internet, on donne accès à beaucoup de gens qui n'oseraient pas franchir le pas d'une boutique de luxe. Ils s'y promènent plus librement et découvrent plus facilement l'ensemble des collections.
Hermès, Dior et Vuitton vendent désormais des produits en ligne. Qu'en est-il pour Van Cleef & Arpels ?
E.J. : Internet avance à une telle vitesse que nous ne fermons aucune porte. Reste que le e-commerce n'est pertinent que s'il est adossé à une présence importante en termes de magasins.
Luxe et Internet, un mariage de raison ?
C. S. : Contrairement aux idées reçues, les marques de luxe n'ont pas boudé Internet et n'ont pas attendu aujourd'hui pour utiliser ce nouveau média. Leur ambition était dès le départ de se positionner différemment des autres sites. Certaines d'entre elles se sont permises très tôt des attitudes et des partis pris singuliers tant sur le plan créatif que sur le plan technologique pour jouer autrement leur rapport aux consommateurs. Mais la réalité ne fut pas celle espérée. Les marques de luxe n'ont pas vraiment créer la différence, à quelques exceptions comme Chanel qui a opté pour le jeu de l'éphémère en offrant un instant de poésie le temps d'une collection autour du camélia.
Quels sont les points faibles des sites de marque de luxe ?
C.S. : Les sites des marques de luxe proposent un traitement rationnel de l'information même s'il est vrai que sur Internet les internautes sont des surfeurs avertis en quête d'informations. Les marques oublient la dimension onirique de leur univers car le luxe c'est du rêve. Les sites ne sont pas aspirationnels.
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