Retrouvez la vie des marques sur www.ilec.asso.fr
Accueil » Revue des Marques » Sommaire » La revue des Marques numéro 88
Top
Revue des marques : numéro 88 - octobre 2014
 

La conversation de marque une opportunité ?

Du fait de leur présence sur les médias sociaux, les marques peuvent converser avec les internautes. Ces échanges peuvent toucher un large public, à condition de veiller à leur qualité.

par Andria Andriuzzi


Andria Andriuzzi
Andria Andriuzzi
Chercheur doctorant à la chaire
Marques & Valeurs de l’IAE de Paris,
université Panthéon-Sorbonne, et
Digital Manager à l’ESCP Europe.
Les marques cherchent depuis longtemps à nouer des relations fortes avec les consommateurs. Avec le développement des médias sociaux, ces relations deviennent plus concrètes : les marques peuvent littéralement « parler » avec les internautes. Par exemple, sur sa page Facebook, la Caisse d’Épargne demande : « Si vous deviez ouvrir une franchise, laquelle choisiriez-vous ? ». Un internaute répond : « Je choisirais une célèbre entreprise de chocolats, ou une enseigne de téléphonie. Doit-on les nommer ? ». D’autres internautes ajoutent leurs commentaires. Un peu plus loin, l’écureuil répond au premier internaute : « Vous pouvez les nommer si vous le souhaitez, pas de soucis », et ainsi de suite. On peut qualifier de « conversation de marque » cet échange de propos en ligne entre le représentant d’une marque et les internautes.

Un essor des activités conversationnelles des marques

starbuck

BHV
Aujourd’hui, les entreprises dépensent des sommes importantes pour engager la conversation avec les internautes ou pour répondre à leurs sollicitations : création de postes de community managers, gestion de pages de marque sur Facebook ou d’espaces conversationnels ad hoc, comme par exemple MyStarbucksIdea.com. Elles développent aussi des programmes de formation à la gestion de l’identité numérique à destination de leurs salariés, et diffusent des chartes d’utilisation des médias sociaux. De plus, la production de contenus de marque, censés générer des conversations, représente une part croissante des budgets marketing. Enfin, les marques intègrent une démarche conversationnelle à leur communication traditionnelle. Par exemple, la Société Générale a lancé l’an dernier une campagne TV mettant en avant la promesse d’une réponse en moins de trente minutes à toute question posée sur Twitter. Plus récemment, une campagne d’affichage du BHV met en scène les tweets de célébrités comme l’humoriste Axelle Laffont, laquelle répond par ailleurs depuis son propre compte aux internautes qui commentent la campagne.
 

Peu d’internautes conversent effectivement avec les marques…

On peut comprendre l’engouement des marques pour les médias sociaux, car les consommateurs utilisent massivement ces outils. En France, 86 % des internautes de 18 à 24 ans possèdent un compte Facebook, et 35 % des cadres supérieurs ont un compte LinkedIn (Observatoire des réseaux sociaux, Ifop 2013). Pourtant, malgré la popularité des médias sociaux et l’activité importante qu’y développent les marques, très peu de consommateurs discutent effectivement avec elles. En 2011, l’Ifop a déterminé que moins de 2 % des internautes commentaient les messages postés par les marques sur les médias sociaux. La question n’a depuis plus été posée… Bien sûr, les consommateurs connectés partagent volontiers leur mécontentent sur les médias sociaux, Twitter en tête (« Hello, de retour de N.Y. après 6 h de retard, merci Air France !! »). Mais, s’il bénéficie d’un fort engouement médiatique, notamment à la télévision où l’on promeut un « hashtag » dans chaque émission, ce média social n’est utilisé que par 17 % des internautes, dont la moitié seraient actifs. Ces constats peuvent paraître décevants : à quoi bon investir tant de moyens sur les médias sociaux alors que cela ne concernerait que si peu de monde ?

… mais l’audience de ces conversations est potentiellement très large

Le caractère public des échanges permet de relativiser cette situation de « non-conversation ». Premièrement, tout individu doté d’une connexion Internet a accès à ces interactions. Il peut, par exemple, consulter la chaîne YouTube d’une marque et visualiser les commentaires des internautes, ainsi que les éventuelles réponses de la marque. Deuxièmement, la plupart des interactions en ligne peuvent être vues par les « amis » des internautes lorsque ceux-ci échangent des propos avec une marque. Par exemple, sur LinkedIn, si un internaute commente un message publié par une marque, ses contacts professionnels verront passer dans leur fil d’actualité un message les informant de cette action, du type « untel a commenté le message de telle marque ». Les échanges publics entre marques et consommateurs peuvent alors se prolonger en conversations privées dans les fils d’actualité et sur les murs des internautes. Les fonctionnalités de la plupart des médias sociaux favorisent en effet la visibilité des interactions, et génèrent une forme de bouche-à-oreille électronique plus ou moins automatisée.
Troisièmement, la visibilité des échanges entre marques et internautes dépasse parfois le cadre des médias sociaux. Plus particulièrement, en situation de crise ou de bad buzz, les commentaires des internautes et les réponses apportées par les marques peuvent faire l’objet de nombreux articles, publiés sur des blogs ou dans les médias traditionnels, et partagés et commentés à leur tour.
Ainsi, les conversations entre marques et internautes, bien qu’elles ne concernent qu’un petit nombre de participants, ont une audience potentiellement plus importante : en étant vues par des internautes spectateurs, en générant des conversations entre consommateurs, ou en étant relayées par les médias. Les interactions entre marques et individus peuvent, bien sûr, être étudiées en tant que telles, car elles présentent un intérêt pour les entreprises, notamment en termes de cocréation ou de marketing participatif. Cependant, bien que de nombreux articles soient consacrés aux meilleures façons de développer « l’engagement » des consommateurs sur les médias sociaux, l’impact de ces conversations sur un plus large public, celui qui ne fait que les observer, mérite aussi d’être pris en considération.

Prendre en compte la qualité des conversations

conversation de marque
Au-delà du taux d’engagement, du nombre de commentaires ou de « fans », il est important de s’intéresser à la qualité des conversations. Des études ont en effet montré que la qualité des conversations au sein des forums de consommateurs avait un impact direct sur les ventes. J’ai étudié six mois d’activité de la page Facebook d’une grande banque, et constaté que plus la qualité des conversations était élevée, plus elles généraient de bouche-à-oreille. On peut bien évidemment discuter de la façon de mesurer la qualité des conversations, plusieurs approches étant possibles, mais ces considérations incitent les marques à se poser des questions sur :
1) leurs stratégies d’acquisition de « fans » sur les médias sociaux, en privilégiant les internautes les plus impliqués plutôt qu’en cherchant à en recruter le plus grand nombre ;
2) les lieux où elles engagent la conversation, les pages Facebook n’étant, par exemple, pas forcément les meilleurs outils pour développer des échanges de qualité ;
3) leur propre activité sur les médias sociaux, la participation des marques aux conversations ayant un effet levier sur leur qualité. En se focalisant sur la qualité, plutôt que sur la seule quantité, la conversation de marque révélerait de meilleures opportunités, par exemple en matière d’image et de réputation, tant auprès de ceux qui participent qu’auprès de ceux qui ne font qu’observer.
 

Le Code de la propriété intellectuelle n'autorisant, d'une part, que les copies ou reproductions strictement réservées à l'usage privée du copiste et non destinées à une utilisation collective, et d'autre part, que les analyses et les courtes citations dans un but d'exemple et d'illustration, toute représentation ou reproduction intégrale ou partielle faite sans le consentement de l'auteur ou de ses ayants droit ou ayant cause est illicite. Cette représentation ou reproduction, par quelque procédé que ce soit, constituerait donc une contrefaçon sanctionnée par les articles L 335-2 et suivants du Code de la propriété intellectuelle
Bot