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Revue des marques : numéro 82 - avril 2013
 

Des conseils de plus en plus précieux

Au coeur de la stratégie des entreprises, l'activité de conseil en propriété industrielle renforce son expertise, gage de sa légitimité.

entretien avec Alain Michelet - CNCPI


À l'ère du digital, des réseaux sociaux, l'adjectif « industrielle », accolé à conseil en propriété industrielle, rend-il compte de l'évolution des enjeux de la propriété « intellectuelle » ?

Alain Michelet
Alain Michelet
Alain Michelet : La profession de conseil en propriété industrielle (CPI) est organisée par le Code de la propriété intellectuelle. Industrielle, intellectuelle, cela justifie votre question. En pratique, ces différences qui correspondent à la structuration des disciplines juridiques n'ont pas beaucoup d'importance.
Intervenant sur le droit de l'innovation, les conseils en propriété industrielle adaptent leurs pratiques aux évolutions qui sont le coeur même de leur activité, et interviennent dans des domaines législatifs et réglementaires de plus en plus étendus. Les problématiques des noms de domaine, les usages sur Internet, le caractère numérique des objets qui peuvent constituer des contrefaçons, la protection des créations numériques… sont notre terrain de jeux quotidien.
 

Les règles déontologiques sont-elles spécifiques à la profession de conseil en propriété industrielle ? Sont-elles vouées à se renforcer ?

Alain Michelet : Notre profession est une profession libérale dont le Code de la propriété intellectuelle organise la déontologie et le contrôle. Elle permet de garantir à nos clients nos compétences, notre indépendance, l'absence de conflit d'intérêts et la confidentialité de nos interventions et des échanges que nous avons avec eux. La confidentialité s'entend au sens fort puisqu'en cas d'investigations judiciaires, d'origine française ou étrangère, ces informations, au titre du « privilège conseil-client opposable », ne seront pas accessibles. Seules limites : les cas de blanchiment d'argent, de trafic de drogue… fort heureusement, ce n'est jamais arrivé ! Ces règles ont été reconnues, y compris par la justice américaine, elles sont fortes et ont vocation à perdurer. Il n'y a pas matière à les renforcer.

Les missions et prestations de conseil en PI s'élargissent-elles à mesure de la sophistication des activités, des nouvelles technologies – créatrices d'un nouveau droit des entreprises –, des nouveaux enjeux ?

Alain Michelet : L'innovation a pris une place telle dans l'économie que nos missions d'accompagnement juridique de l'innovation s'élargissent pour répondre aux nouveaux enjeux. Les activités de propriété industrielle, autrefois effectives mais souvent conservées dans l'ombre, sont, aujourd'hui, sur le devant de la scène et font régulièrement l'objet de communication dans la presse, faisant ressortir des enjeux financiers considérables. Nos missions deviennent donc un enjeu de compétitivité pour les entreprises, mais aussi pour les États. N'espère-t-on pas, aujourd'hui, une sortie de crise par l'innovation ? Cela conduit à une diversification des activités des conseils en PI, une plus forte adéquation de leurs missions avec la stratégie des entreprises.
L'utilité et la rentabilité de ces activités de PI s'en trouvent d'autant légitimées, leur optimisation est devenue un sujet majeur. Notre activité a, bien entendu, suivi les développements scientifiques et techniques dans les technologies de la communication et de l'information, mais aussi dans les biotechnologies, la pharmacie, etc.

L'incompatibilité juridique des professions de conseil en PI et d'avocat est-elle toujours en vigueur ?

Alain Michelet : Oui, l'incompatibilité est toujours la règle. Les grands débats sur le rapprochement ou la fusion des professions semblent, aujourd'hui, clos et ne seraient plus d'actualité. Les conseils en PI, très spécialisés, sont au nombre de 900, les avocats sont près de 55 000 ! Nous travaillons quotidiennement ensemble, et surtout nos déontologies sont proches. Cela a justifié la possibilité d'un rapprochement. Toutes les conditions n'ont pas été remplies pour aboutir.

Le 24 janvier 2013 a été créée l'association Union pour la juridiction unifiée des brevets. Quelles sont ses missions ?

Alain Michelet : C'est surtout la création de la juridiction unifiée elle-même qui est importante. Elle est en bonne voie et vient clore quelque quarante ans de discussions. Selon les plus optimistes, elle entrera en vigueur en 2014. Le siège de sa division centrale sera à Paris, ce qui renforce la visibilité de notre activité brevet, et cette juridiction verra le jour en même temps que le brevet à effet unitaire, titre unique produisant des effets sur le territoire de l'Union européenne, correspondant à la marque communautaire.

Peut-on prévoir un développement continu de l'internet ? Bientôt arriveront les extensions villes ou grands groupes… L'OMPI(1) a su rebondir sur ce sujet. Une pression pour obtenir une autorité mondiale neutre pour la gestion des noms de domaine, qui relayerait l'ICANN(2), ne s'impose-t-elle pas ?

Alain Michelet : L'OMPI a mis en place un dispositif de médiation et d'arbitrage sur les noms de domaine, reconnu et plébiscité. Il fonctionne très bien et un certain nombre de conseils en PI français sont arbitres auprès de l'OMPI.

Tout semble, aujourd'hui, devenir marque, les régions, les pays, les hommes politiques… Cette dilution n'est-elle pas préjudiciable au concept même de marque ?

Alain Michelet : La marque donne une référence à l'origine des produits ou services qui la portent. Face à la mondialisation, on a parfois du mal à savoir d'où viennent les produits, comment ils ont été élaborés. D'où le recours plus fréquent à la marque qui permet une identification de la personne qui s'implique dans le produit. Le titulaire de la marque s'engage vis-à-vis du produit qui la porte. Ses critères de valeur doivent se retrouver dans sa marque. Dans une société de plus en plus mondialisée, la référence à un repère devient nécessaire.
Il ne faut pas qu'il y ait d'excès dans l'utilisation de la marque. Qui peut s'approprier, utiliser la marque France, la marque Paris ? Soulignons que, parallèlement à l'omniprésence de la marque, la tendance est à la concentration. Certains grands groupes, titulaires de nombreuses marques, concentrent l'usage sur quelques marques phares, concentrant d'autant les frais marketing et juridiques de défense des droits dans le monde.

Notes

(1) Organisation Mondiale de la Propriété Industrielle
(2) Internet Corporation for Assigned Names and Numbers
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