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Revue des marques : numéro 73 - Janvier 2011
 

Orangina de nouveau secoué

Après quelques années d'errance publicitaire, Orangina renoue avec sa vocation avant-gardiste. Des personnages mi-animaux, mi-hommes sont mis en scène dans une saga publicitaire qui joue sur le ton de l'humour et du décalage.

Par Jean Watin-Augouard


Orangina de nouveau secoué
Perdre, depuis 2000, trois points de part de marché sur le soft drink et six sur celui des boissons aux fruits gazeuses ! Quand on s'appelle Orangina, c'est pour le moins problématique ! La marque ne répondrait-elle plus autant, aujourd'hui, aux attentes des consommateurs ?
En termes gustatif, elle n'a pas changé depuis 1936 ! Elle a même diversifié son offre et l'a fait savoir comme l'illustre sa campagne de communication, une des plus emblématiques et secouées dans l'univers des marques depuis le fameux "tic du barman" en 1980. Tout le monde a en mémoire la saga des "hommes bouteilles" conçue par Alain Chabat en 1994. Oui, mais voilà ! "Depuis, quand on interroge nos consommateurs, c'est cette saga qui est citée et les suivantes n'ont laissé aucune trace", confie Stanislas de Parcevaux, directeur marketing Orangina Schweppes France. Un constat confirmé par Fred et Farid : "Malgré le même investissement publicitaire en achat média et en campagne publicitaire, toutes les publicités depuis la fin des années 1990 n'ont pas été retenues dans la mémoire des consommateurs, donc vues. Si les indices de satisfaction étaient très bons, en revanche, les actes d'achat avaient baissé.
La marque était en train de devenir une marque patrimoniale, toujours adorée par les Français mais peu consommée !" Citons, pour mémoire, les campagnes "Ils ont soif" (1998), "les Brigades anti soif" (2000/2001), les personnages habillés en pulpe pour les garçons et en bulle pour les filles qui s'associent dans une discothèque (2002), l'ange et le démon avec Jamel Debouzze (2003), "le salaire de la peur" (2005), Sup d'Orangina (2006). "Pendant dix ans, des changements de copies publicitaires ont eut lieu quasiment chaque année", reconnaît Florence Burtin, marketing manager. Ajoutons que durant cette période, la marque a été quelque peu secouée, par la tentative de rachat, avortée, de Coca-Cola en 1999, la fusion avec Pampryl en 2000, le rachat par Cadbury Schweppes en 2001, puis par un consortium composé des fonds d'investissements The Blackstone Group et Lion Capital en 2006, avant d'entrer dans le giron du groupe japonais Suntory en 2009.
Par ailleurs, le marché accueillait des nouveaux concurrents comme Taillefine, Perrier Fluo, puis Mix…
 

Langage propriétaire

Orangina de nouveau secoué
Comment rebondir ? Comment retrouver un territoire d'expression aussi puissant que celui des hommes-bouteilles dans lequel la marque peut de nouveau s'identifier et revenir sur le devant de la scène ? "En cassant les codes créés les années précédentes pour construire une plateforme radicalement différente et forte et recréer une saga avec davantage de proximité avec les consommateurs. La marque se devait de renouer avec sa tradition avant-gardiste exprimée par des créatifs", résume Stanislas de Parcevaux1. Retenue à l'issue d'un appel d'offre, l'agence Fred & Farid propose, fin 2007, une nouvelle plate-forme "naturellement pulpeuse". Au coeur du dossier, trois questions à résoudre : comment mettre plus d'iconicité dans la marque, quelle promesse produit avancer pour plaire à plusieurs cibles - la mère qui achète, l'enfant et les 18/25 - et comment redonner une vraie raison d'achat dans le secteur du soft drink ? "La vérité est dans l'ADN de la marque", rappellent Fred et Farid. "Dans Orangina, il y a 12 % de jus, c'est un produit hybride, le plus décalé des jus et le plus naturel des soft drinks. Orangina est une combinaison entre naturalité (produit sans colorant ni arôme artificiel) et décalage. Notre première recommandation est alors de mettre en scène la nature, de la manière la plus sexy, pour vendre le plus sexy de ses produits. Un monde hybride à l'instar du produit avec la saga des pin-up dans une nature décalée. Nous avons replacé la naturalité au centre de la promesse et défini un langage propriétaire, uniquement attribuable à Orangina et pas à une autre marque", expliquent Fred et Farid. "L'alliance du rationnel et de l'émotionnel", ajoute Stanislas de Parcevaux. C'est avec l'un des plus grands studios d'animation londoniens, The Mill (oscar pour les effets spéciaux du film Gladiateur), que l'agence Fred & Farid a pu donner vie aux animaux. Là aussi, Orangina renoue avec sa tradition avant-gardiste et accepte de prendre le risque de relever ce défi. Près de 150 personnes dont 50 en permanence ont travaillé pendant quatre mois sur les effets spéciaux, 3D, CGI (Computer Generated Imagies), motion capture (capteurs sur les acteurs)… autant de procédés révolutionnaires au service de la communication. Reste que, réaliser l'anamorphisme sur le plan artistique nécessite une base morphologique : "Il est difficile de faire cela avec des insectes ou des oiseaux car les animaux doivent être crédibles", précisent Fred et Farid.
 
Orangina de nouveau secoué

Orangina est une combinaison entre naturalité (produit sans colorant ni arôme artificiel) et décalage…

Saga animalière

Orangina de nouveau secoué
Sur fond de musique brésilienne réorchestrée, la première campagne lancée d'abord au cinéma fin 2007 dans un film 45'' renoue avec les grandes communications publicitaires de la marque en mettant en scène des animaux et des plantes (hibiscus) anthropomorphiques dans une nature pleine de rythme et de sensualité toute en ramenant le produit au premier plan. Le nouveau logo, conçu par l'agence P'Référence ne met-il pas en valeur la bouteille entière en forme d'écorce d'orange. L'ours, la girafe ou la biche, le zèbre, le panda deviennent les nouveaux ambassadeurs de la marque. La campagne se décline ensuite à la télévision en format 30'' et 20''. Parallèlement, pour rentrer de nouveau dans les familles avec enfant, Orangina renoue avec l'innovation en lançant, en 2009, Orangina Cowboy et Orangina Indien, mélange d'Orangina avec une touche de menthe pour le premier et une touche de grenadine pour le second. Deux films de 10'' leur sont consacrés avec un puma pour Indien et une jument pour Cowboy. Un quatrième film est conçu pour Orangina Light qui met en scène une hyène qui se moque.
"A fin 2009, les ventes ont progressé de 20 % et Orangina a gagné un million de foyer supplémentaire", confie Stanislas de Parcevaux. Et la créativité publicitaire fut récompensée par le prix Effie 2009.
 
Tout le monde sait qu'Orangina contient de l'orange, on veut donc provoquer le décalage en vendant le produit pour des mauvaises raisons.
Orangina de nouveau secoué
Fort de ce succès, Orangina lance en 2010 une deuxième campagne "Orangina, naturellement", l'adjectif "pulpeuse" n'étant plus utile. "L'objectif est de renouer avec l'humour en parodiant les plus grands clichés publicitaires tournés en dérision à travers les pin-up", soulipage gnent Fred et Farid. Un caméléon plein d'acné, une chèvre sale, un ours qui transpire, un panda qui fait sa toilette intime, une biche à l'heure du goûter, une jument qui a mauvaise haleine, une girafe et son linge sale, autant de personnages mis en scène, cette fois-ci dans la vie réelle "qui se moquent des sur-promesses de certaines marques qui prétendent laver plus blanc que blanc…".
"Tout le monde sait qu'Orangina contient de l'orange, on veut donc provoquer le décalage en vendant le produit pour des mauvaises raisons", expliquent Fred et Farid. "Une manière de mettre davantage l'accent sur la proximité, renforcée par le fait que les pin-up parlent", ajoute Stanislas de Parcevaux. Pinup, au reste déclinable selon les saisons, le dauphin pour l'été, le bouquetin en hiver. A ce jour, on en compte une quarantaine… "Les post tests montrent que les gens ont bien compris la parodie publicitaire, l'humour et la naturalité. Nous avons réussi le pari du double langage publicitaire puisque les films sont compris aussi bien par les enfants que par les adultes", précisent Fred et Farid. Cette deuxième campagne s'accompagne d'une nouvelle vague d'innovation avec le lancement d'Orangina RastaMan (goût tropical) et Orangina L'Aristo (goût cassis) portant le nombre de références de la gamme à sept2. Deux petits films leur sont dédiés : le lion pour RastaMan et un caniche pour L'Aristo. "La saga peut se décliner sans lasser le consommateur", souligne Stanislas de Parcevaux.
 
Le Grand Palais
Plus de 5 000 jeunes au Grand Palais

Communication 360°

Orangina de nouveau secoué
Acné - extrait du film
de la campagne 2010
Dans leur réponse à l'appel d'offre d'Orangina, Fred et Farid ont suggéré une deuxième recommandation : celle de ne pas raisonner sur une seule campagne publicitaire traditionnelle mais sur une plateforme de communication qui décline l'univers décalé sur les lieux de vente, les packagings, les café-restaurants, les boulangeries, avec des objets publicitaires (set de table, décapsuleur, horloge, cartes postales…)… "L'objectif est de créer un lien émotionnel très fort entre les cibles et la marque grâce aux nombreux points de contact." Enfin, troisième recommandation : celle de décliner la campagne sur l'ensemble des médias, films, affichage, iPhone (opération Bash Machine)3, Facebook. Sur le plan événementiel, Orangina multiplie donc sa présence hors média avec le Wake Jam Tour, le Beach Rugby4 et la tournée des plages où l'on découvre, en juillet 2008 les Kia Picanto et Rio avec des seuils de portes signés Orangina.
"L'objectif est de travailler la proximité pour les 15-25 ans", rappelle Stanislas de Parcevaux. Ainsi, durant la nuit du 24 avril 2010, Orangina a réuni plus de cinq mille jeunes au Grand Palais au cours de l'opération Gliss and Mix qui proposait deux grands bassins pour surfeur, une rampe de ski avec neige (en partenariat avec la marque de surf O'neill, inventeur de la combinaison néoprène), une démonstration de wakeboard et une scène géante de musique avec Joey Star, Izia… La marque, qui se singularise par le sponsoring musical (la lambada, la soca dance) renoue ainsi avec la musique. En juin 2010, durant la Coupe du monde de football, la tournée d'un bus a permis de distribuer quelques 200 000 canettes et d'organiser l'opération de la plus belle ou déjantée coupe du monde……de cheveux, comme celle des pin-up de la campagne. A la clé, un voyage à Tokyo ou sa tête dans un magazine. Et, puisque la marque va fêter ses 75 ans cette année, pourquoi ne pas brocarder la promesse de l'éternelle jeunesse en mettant en scène une pin-up buvant de l'Orangina et… rajeunissant ?
 
Orangina de nouveau secoué
Affiches 2009
1- La marque a toujours eu des partis pris publicitaires et d'innovation avant-gardistes : elle fut la première à lancer le light, le rouge, la canette en métal…
2 - Le jaune (le regular) et le light sont les deux piliers avec 75 % des volumes. Le Rouge, Indien, Cowboy, RastMann et Aristo complètent la gamme.
3 - La Bash Machine permet de télécharger les pin-up de la campagne à partir du téléphone portable, d'enregistrer un message et d'envoyer des plaisanteries aux amis. To bash : vanner, faire une blague.
4 - Orangina est aussi fournisseur officiel du XV de France.
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