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Revue des marques : numéro 69 - Janvier 2010
 

Le nouveau sens des marques

Grâce à internet, les marques deviennent dynamiques, mouvantes, innovantes dans leur expression, à l'inverse de ce que nous a appris trente ans de "branding management".

Propos recueillis par Thomas STENGER*.



Le nouveau sens des marques
L'accès aux marques et à leur univers est rendu plus facile pour tout un chacun grâce à Internet. Difficile en effet d'imaginer pour une marque de se passer d'une présence en ligne que ce soit sous la forme d'un site web, a minima, ou par une politique e-marketing plus avancée mobilisant les différents médias en ligne tels que les réseaux sociaux numériques, les plateformes de blogs, les communautés virtuelles ou les mondes virtuels. La politique de marque sur Internet, parfois qualifiée d'e-branding, renvoie à certaines problématiques connues par les spécialistes de la marque mais elle comprend également des spécificités. Le choix du nom de marque est corrélé à celui du nom de domaine. L'un et l'autre ont des conséquences sur le référencement et donc sur l'audience potentielle. Par ailleurs, le web offre un certain nombre d'opportunités pour développer l'identité de marque, notamment son style. Mais tous ne sont pas égaux devant le web : anciens et nouveaux venus ont chacun des atouts en main pour gérer leur présence sur Internet. Tous ont en tout cas intérêt à suivre la vie de leur marque en ligne, voir les éventuels détournements dont ils font l'objet sur la toile, car à l'heure du Web 2.0 participatif les internautes sont peut être les mieux armés pour faire vivre les marques en ligne.

Marque et nom de domaine

Le nouveau sens des marques
Le nouveau sens des marques

Le nouveau sens des marques
Le nouveau sens des marques
Sur Internet le nom de la marque est souvent celui du nomde domaine. La création d'un nom de domaine pour une entreprise s'apparente ainsi à la création d'une marque sur Internet. Si le dépôt d'un nom de domainene constitue pas un droit sur la marque, juridiquement, le nom de domaine tend à être considéré comme un nouveau droit de la propriété industrielle. Pour choisir un nom de domaine, il est fondamental de penser en termes de politique de marque. Plusieurs cas de figure peuvent être considérés.
Si le nom de la société est très connu et n'est pas encore pris par un homonyme, il est alors possible de déposer le nom du site en le calquant sur le nom de marque (ex. darty.com, renault.fr, apple.com).Dans ce cas, le nom de la marque "traditionnelle" possède déjà une image forte sur laquelle elle va pouvoir capitaliser et asseoir sa notoriété en ligne. Les clients de ces grandes marques vont "naturellement" écrire leurs noms dans un moteur de recherche pour retrouver le site webde la marque.Pour vérifier la disponibilité des noms de domaine, il suffit de consulter les sites spécialisés tels que celui de l'AFNIC(1) (site officiel de l'association française pour le nommage) pour un domaine en.fr ou sur le site d'une société spécialisée telle que www.gandi.net ou www.domaine.fr pour d'autres extensions (.com, .net, .fr…).

Si la marque n'est pas très connue, s'il s'agit d'une nouvelle marque par exemple, ou si le nom de cette marque est déjà pris par une autre société, il faudra choisir un autre nom pour le site web. Dans ce cas, la problématique est très proche de cellede lacréation d'une marque "traditionnelle". Les concepts depositionnement de marque, de valeurs de marque, d'image de marque s'appliquent auchoix de nom du site web. Le choix sémantique associé au nommage renvoie essentiellement à deux options.
Dans la première, le nomde domaine évoque l'activité du site. C'est par exemple la solution retenue par la plupart des assureurs en ligne ( ex. assurland.com, devismutuelle.com…). Idéalement, le nom de domaine du site marchand renvoie aussi au positionnement du site. Des sites tels que Cdiscount ou Price- Minister indiquent clairement un positionnement et une promesse client axés sur les prix. Vente-privee.com renforce le sentiment de club et de clients privilégiés (les clients sont d'ailleurs qualifiés demembres).
La deuxième option consiste à choisir un nomdéconnecté de l'activité du site. Ce choix est alors plus coûteux car tout est à construire : image, notoriété…De grandes sociétés sur Internet ont pris ceparti (ex.Yahoo,Amazon). Elles préfèrent ainsi éviter de prendre un nom de marque trop proche d'un produit ou de l'activité de départ car si le positionnement initial est facilité, cela freine les possibilités de diversification et l'extension de marque. Amazon a été choisi dans ce sens et la diversification menée depuis 2006 avec de nombreux services informatiques en ligne eût été moins évidente si un nom proche de sa première activité (la vente de livres) avait été retenu. De la même manière, Yahoo ! est libre d'évoluer dans n'importe quelle direction stratégique et AuctionWeb (mot à mot "enchère web") est ainsi devenue Bay un an après sa création, laissant plus d'opportunités pour l'avenir. Cette solution laisse en effet une plus grande marge de manoeuvre pour le développement futur de l'entreprise et le champ ouvert à toute diversification, à toute activiténouvelle. Parailleurs, ce choix est aussi plus adapté aux entreprises ayant une ambition internationale (un site tel que le-livre.com est limité à la francophonie).

Certaines marques en ligne ont fait le choix d'un rattachement à une marque traditionnelle, connue du grand public, dans une logique de double marque qui rappelle celle de l'articulation marque-mère marque-fille. La page d'accueil de Grosbill.com indique ainsi : "powered by Groupe Auchan" et le logo de ooshop.comprécise "par Carrefour" en ajoutant même le logo du distributeur. Cdiscount.com a opté pour une solution intermédiaire avec un logo propre en haut de page mais également référence à son appartenance au groupe Casino en bas de page.

Un groupe peut faire le choix d'une présence unique sur le Web ou bien proposer plusieurs sites web qui peuvent être reliés entre eux (ex.sncf) ou pas.C'est le cas lorsque la marque produit a une identité forte et une notoriété qui peut lui permettre de se passer de celle de la marque mère. Les grands groupes alimentaires que sont Nestlé et Danone offrent plusieurs cas de figures intéressants. Le choix du nom de marque et de domaine a également un impact sur la qualité du référencement du site. En France, près de 50 000 sites marchands actifs sont comptabilisés par la FEVAD fin 2008, soit 30 % de plus que l'année précédente. En conséquence, il devient très difficile d'émerger dans cet environnement de plus en plus concurrentiel. La première difficulté aujourd'hui pour les nouveaux entrants est ainsi d'apparaître sur la toile : d'être visible auprès des clients potentiels. Le référencement de la marque et du site sont aujourd'hui des enjeux essentiels pour assurer la présence en ligne de la marque.
À l'heure du Web 2.0 participatif les internautes sont peut-être les mieux armés pour faire vivre les marques en ligne.
Sur Internet, les marques ont l'opportunité de jouer davantage avec leur identité, avec les codes graphiques comme avec leur design sonore.

Le web : l'opportunité de repenser en permanence l'identité de marque

Le nouveau sens des marques

Le nouveau sens des marques
Logo Google pour le 50e anniversaire
des briques Lego (28 janvier 2008)
Dans le monde traditionnel des marques, les modifications de l'identité visuelle de marque, en particulier sur le plan logotypique, sont peu fréquentes et souvent associées à des événements majeurs pour l'histoire de la marque, et elles sont toujours encadrées avec rigueur par des "chartes graphiques". A l'inverse, sur Internet, les marques ont l'opportunité de jouer davantage avec leur identité, avec les codes graphiques comme avec leur design sonore. Cela s'explique tout d'abord par la facilité technique et le faible coût de la démarche. Modifier un logo sur un site web n'a pas les mêmes conséquences budgétaires que s'il s'agissait de modifier tous les visuels physiques d'une entreprise traditionnelle.
Cdiscount, par exemple, affiche un logo à la typographie toujours identique mais avec des couleurs variables. La palette de couleurs conserve toutefois systématiquement la dichotomie "C" et "Discount" afin de toujoursmettre en évidence son positionnement. L'exemple du logo GrosBill.com associé au PèreNoël (cf. supra) ou de Rue du Commerce, coiffé d'un bonnet deNoël illustrent la plus grande liberté dont disposent les marques sur Internet pour jouer avec leur identité visuelle.
Cette liberté s'explique également par la forte exposition dont jouissent les grandes marques du web. Google est l'exemple le plus symptomatique avec un taux d'exposition unique au monde et auprès des internautes français en particulier puisqu'ils utilisent ce moteur de recherche pour près de 90 % de leurs requêtes en ligne. La société de Montain View est ainsi connue pour modifier très fréquemment son logo selon l'actualité. Google propose notamment des "logos pour les fêtes(2)" pour célébrer des événements aussi variés que l'anniversaire de l'ascension de l'Everest, de Van Gogh, l'arrivée du printemps, la Saint-Valentin ou le 50e anniversaire des briques Lego. On notera que le dernier exemple s'inscrit dans une démarche de cobranding (cf. ci-dessous).
Le développement d'une identité sonore est également une opportunité pour les marques sur Internet. Mais elles sont encore peu nombreuses à avoir investi dans ce sens. On notera toute fois quelques exemples intéressants, notamment le site web du Bon Marché, un des pionniers en la matière, qui propose une mise en scène sonore en ligne en cohérence avec celle en magasin. Le site web de Levi's propose un son rock‘n roll et celui de Lacoste une bande son en cohérence avec la volonté de rajeunissement de la marque. Fauchon.compropose une expérience de navigation sonore au cours de la visite sur son site web. Le webdesign sonore de la marque n'en est qu'à ses débuts et les expériences menées par exemple pour les différentes fragrances du parfum de Karl Lagarfeld (sur kapsulebykarl.com) indiquent les prémisses d'un développement multimédia de l'identité de marque sur Internet. Le web n'est pas seulement un nouveau média, ni même un nouvel univers d'opportunités d'exposition, d'O.D.V., pour les marques. Il faut maintenant le considérer comme une incitation - et l'impérieuse obligation - à repenser en permanence le sens à donner aux marques. Sur le web, les marques commencent une nouvelle vie et nous invitent, comme certains auteurs tel Jean FrançoisVariot l'avaient pressenti, à revoir ce que nous savions de l'identité de marque.

Notes

(*) maître de conférences, Laboratoire CEREGE et CEPE, IAE de l'Université de Poitiers
(1) www.afnic.fr
(2) Un archivage des logos pour les fêtes depuis 1999 sur : http://www.google.fr/intl/fr/holidaylogos.html
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