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Revue des Marques - numéro 27 - Juillet 1999
 

 

L'INTERPRETATION STRICTE DES ACCORDS DE COEXISTENCE
Un conflit entre deux marques identiques ou proches l'une de l'autre, peut être réglé par la conclusion d'un accord dit "de coexistence" entre leurs titulaires qui évitent ainsi les aléas d'une procédure et la situation d'incertitude dans laquelle ils se trouveraient jusqu'à ce qu'elle soit parvenue à son terme définitif


par Olivier Mendras, avocat à la cour de Paris

• De tels accords ont parfois uniquement pour objet de comporter la reconnaissance expresse par leurs signataires de l'absence de risque de confusion entre les signes qu'ils exploitent, soit en raison de leur nature, soit en raison des produits ou services auxquels ils s'appliquent. Plus généralement de tels accords ont pour objet de définir les droits que se consentent réciproquement leurs signataires sur les signes qu'ils exploitent respectivement.
 
• Dans certains cas seront déterminées les modalités dont devra être assorti l'usage de la marque par chacune des parties et il peut, par exemple, être prévu que l'une d'entre elles ne l'utilisera qu'en y adjoignant un élément distinctif, dénominatif ou figuratif complémentaire. Dans d'autres cas, seront délimitées les catégories de produits ou de services, éventuellement dans un même secteur d'activités ou dans des secteurs similaires, pour lesquelles chacune des parties pourra faire usage de la marque.
 
• Afin qu'il soit définitif et irrévocable, il est impératif qu'un accord de coexistence se voit conférer, sans ambiguïté, la nature d'une transaction et il est tout aussi impératif qu'il fasse l'objet d'une inscription sur les registres de l'Institut National de la Propriété Industrielle. Car, à défaut, il ne lierait pas les éventuels cessionnaires successifs des marques concernées. Rappelons que le droit communautaire admet expressément la licéité de ce type d'accords sous réserve qu'ils n'aient pas pour effet d'aboutir à une restriction de la concurrence par un cloisonnement territorial du marché.
 
• Il peut advenir bien évidemment que l'exécution d'un accord de coexistence soulève des difficultés et donne lieu à un litige lorsque l'une des parties considère que l'autre ne respecte pas les engagements qu'elle a souscrits. La juridiction saisie va alors devoir trancher entre deux interprétations divergentes des dispositions de la convention et la solution qu'elle doit adopter est dictée par un principe unanimement admis par la jurisprudence selon lequel les accords de coexistence doivent être interprétés restrictivement.
 
• Ce principe a été réaffirmé très fermement et très clairement à diverses reprises par des décisions récentes rendues notamment par la troisième chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris, spécialisée dans les affaires de propriété industrielle. Nous citerons un jugement rendu par cette juridiction le 21 juin 1996 (PIBD 1996 - n° 620 - III.569) aux termes duquel il a été rappelé que si un accord de coexistence pouvait toujours être renégocié par les parties, "il n'appartenait pas au tribunal de l'élargir".
 
• Nous citerons également une décision aujourd'hui définitive, de la troisième chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris statuant dans un litige opposant le titulaire de la marque "Polydent" à une entreprise à laquelle il avait consenti l'autorisation de faire usage de la raison sociale " Polidentia " et à laquelle il reprochait d'avoir déposé ce terme à titre de marque.
 
• Le Tribunal a accueilli l'action ainsi engagée en soulignant que l'accord de coexistence intervenu entre les parties, qui ne pouvait "qu'être interprété restrictivement dès lors qu'il emporte une renonciation de la demanderesse à faire valoir partie de ses droits, ne valait que pour l'usage du terme "Polydentia" à titre de raison sociale (TGI Paris 20 mars 1998 - Affaire Stafford Miller C/ Polydentia - inédit). Nous citerons encore une autre décision inédite toujours rendue par la même chambre du Tribunal de Grande Instance de Paris (27 mai 1998 - affaire Atlantis C/ Abvent) ayant jugé bien fondé la demande formée par le titulaire de la marque Atlantis à l'encontre d'une société n'ayant pas respecté l'engagement qu'elle avait souscrit de n'exploiter la marque "Art lantis" pour des produits similaires, exclusivement dans un graphisme précisément définit "par des clauses claires et univoquee ne nécessitant aucune démarche interprétative et devant être strictement appliqué" pour reprendre les termes mêmes employés dans le jugement.
 
• La jurisprudence que nous venons d'évoquer doit approuver sans réserve puisque le principe de l'interprétation stricte des accords de coexistence est parfaitement conforme à la logique juridique et totalement justifiée dès lors que de telles conventions comportent nécessairement des renonciations ou des limitations à des droits . L'application de ce principe conduit bien évidemment à inciter à la plus grande prudence et à la plus grande vigilance lors de la rédaction d'accords de coexistence.

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